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Le retard en innovation peut être un avantage

Une civilisation est un organisme vivant. Elle évolue sans cesse. Ses organes se déforment, se complexifient puis s’adaptent. Mais il arrive un moment où les évolutions successives amènent tellement de complexité que les organes ne peuvent plus suivre. Le système ne s’adapte plus à son environnement, il périclite. Nous en avons de nombreux exemples dans l’histoire de l’humanité : le chaos est suivi d’une période de léthargie. Ce processus dure environ 400 ans. Il ne fait pas envie.

L’Europe est passée de l’ère agraire à l’ère industrielle dans la douleur, mais finalement avec succès. À présent, elle aborde l’ère numérique dans le désarroi, car elle subit ce changement et ses décideurs font allégeance à ceux qui mènent le jeu. Or, objectivement, il n’y a plus de raison de laisser perdurer cette situation.

L’innovation est un processus continu, avec certes des errements, mais la ligne directrice est relativement lisible. Pour ce qui concerne l’espèce humaine, son évolution converge toujours vers l’enrichissement de son potentiel cérébral. Nos évolutions vont donc dans ce sens.

Louper une innovation n’est pas un drame à condition de rester en mouvement. Une innovation intermédiaire, qui nécessite de lourds investissements longs à amortir, peut constituer un handicap. De même, courir derrière les innovations des autres est inefficace.

Cependant, il est toujours possible de s’introduire ou se réintroduire dans le processus de progrès et d’en tirer avantage.

Par exemple, actuellement, l’Afrique innove de toute part, en tenant compte des erreurs commises sur les autres continents.

Autre exemple : nous avons actuellement la possibilité de nous réapproprier notre autonomie numérique à travers les nouveaux espaces créés par les objets connectés et les monnaies mathématiques.

 

Le poids de notre histoire

Les rois avaient pris l’habitude de solliciter le concours financier des grands argentiers pour mener leurs guerres prédatrices (contrôle des terres et des richesses accumulées). Mais, les grands argentiers se sont rendu compte qu’ils pouvaient faire et défaire les guerres et même choisir le vainqueur.

Avec la dernière guerre mondiale, la démonstration a été faite que les détenteurs de savoir-faire en matière de traitement de l’information pouvaient aussi jouer ce rôle.

Par ailleurs, face aux progrès technologiques, les guerres militaires sont apparues trop dévastatrices. D’autres formes de domination ont donc été développées, mettant en œuvre la finance et la capacité d’influence.

Aujourd’hui, nous célébrons le succès de Steve Job, de Marc Zuckerberg et de quelques autres héros, plus ou moins fabriqués. Nous oublions de nous attarder sur le fait qu’ils abusent de notre système économique. Nous écoutons avec attention les cabinets de conseil d’outre Atlantique dont leurs recommandations ne nous mettent pas toujours sur la voie de notre futur. Nous entretenons l’idée du rêve américain, versus la veille Europe qui est idéale pour faire du tourisme… etc. Dans nos expressions et dans nos gestes, nous nous comportons comme si nous étions des vaincus paisibles.

Pendant, ce temps-là, d’autres citoyens du monde préparent l’avenir, du moins un avenir. Certains, par exemple, rêvent de réduire les états à leur plus simple expression, au profit d’entreprises concentrées à l’extrême qui sont en réalité contrôlées par des pays dont les devises sont les plus efficaces. Le monde serait alors dirigé non plus par des démocraties, mais par les détenteurs des capitaux. Le contraire de l’intelligence collective qui est la nouvelle tendance vers laquelle nous tendons.

De fait, c’est une nouvelle vision du monde qui se fait jour : l’argent est remis en question. D’autres formes de richesses s’imposent comme par exemple : la data et la maîtrise des réseaux sociaux (2.0).

Avec la maîtrise de ces réseaux, il est possible de fabriquer des données stratégiques vendues à prix d’or auprès des gouvernants. Il est aussi possible de se rendre indispensable dans le commerce de service, sans posséder les investissements nécessaires ni prendre de risque social avec les personnes qui rendent ce service. En dominant ce double commerce, il est possible de piloter tous les jeux d’influence.

La veille économie devient subordonnée à la puissance socio-numérique. Les investisseurs ne s’y trompent pas : la capitalisation de Google est 394 milliards de dollars et celle de Général Electric est de 260 milliards.

 

Monnaie et pacte social, des innovations prioritaires

Quoi qu’il en soit, la notion de monnaie devient très importante. Dans sa forme actuelle, elle permet de protéger notre patrimoine entrepreneurial (capacité à entreprendre), mais dans des formes (innovantes) à venir, elle va permettre de protéger notre terreau en favorisant les échanges qui portent cette fois, non plus de biens et de service, mais sur à l’éclosion de belles personnes, d’innovations, de justice, de démocratie ou encore de spiritualité.

En effet, ces formes d’échanges ne peuvent se faire avec de la monnaie commerciale et encore moins avec de la monnaie dette. Et pourtant ils vont devenir hautement stratégiques pour développer l’attractivité des talents.

Alors, prenons notre autonomie de pensée et acceptons de regarder les retards qui déforment nos organes et les paralysent dans la complexité. Comme dans tous les processus d’évolution, nous allons devoir simplifier nos organes et en développer de nouveaux qui auront été conçus pour la nouvelle donne.

Certes le système monétaire est concerné, mais il y a aussi le pacte social.

La logique qui a prévalu au lendemain de la dernière guerre, a consisté à protéger le système industriel qui lui-même a eu en charge de protéger les salariés. La forme d’industrie de cette époque, fortement capitalistique, laisse progressivement la place à une industrie radicalement différente. Désormais, les entreprises créent peu d’emploi et exigent des collaborateurs fortement préparés sur le plan éthique et psychique. Elles recherchent également des créatifs et des besogneux, mais sans se lier à eux. La volatilité qui en résulte doit être compensée par de la stabilité créée par les états à travers un pacte social d’un genre nouveau qui donne à chacun les moyens de réussir sa vie et qui favorise les comportements favorables aux intérêts de la communauté.

Ce changement est disruptif puisqu’il s’agit d’innover sans aucun modèle de référence.

Croire en nous, les Européens en ont tous envie mais il y a ceux qui ne comprennent pas le sens de l’Histoire. Alors ils se radicalisent. Nous devons les aider à comprendre où nous en sommes et le rôle qu’ils ont à jouer.

Expliquer la radicalisation extrême, les médias le font actuellement très largement depuis le vendredi 13 novembre dernier. Mais nous souffrons aussi d’une radicalisation rampante qui nécessite un autre traitement.

Les campagnes électorales sont un moment privilégier pour le faire. Je salue les candidats qui ont conscience de leur rôle. Mais pour être crédible, ils doivent dépasser leurs intérêts personnels… Finis le temps des querelles, voici le temps des débats et des expérimentations.