Depuis la sédentarisation

L’homme s’est sédentarisé pour construire des monuments sacrés mais aussi des objets désirables tels que des armes, des outils et des bijoux. Il a découvert la notion de commerce, de propriété et donc de rente.

à présent, avec le développement des outils d’accès au savoir, la notion de valorisation de savoir-faire et de talents prend une place stratégique. Il sait ce que coûte une bouteille de lait ou le traitement du Sida. Il ne connaît pas la valeur de la richesse culturelle et la capacité d’innovation de sa ville. Il sait simplement qu’il doit désormais les faire prospérer.

 

L’Homme a fabriqué des instruments d’échange de plus en plus complexes, entièrement axés vers la satisfaction des besoins primaires et plus particulièrement vers les récompenses en dopamine fournies par le striatum (dont : la nourriture, le sexe, le statut social, le confort et l’accès à l’information). Il a établi des règles qui préservent la propriété et la rente. Ces instruments évoluent. En particulier, ils se numérisent et deviennent intelligents.

Cette évolution arrive à point nommé car la vision que nous avons de la propriété évolue. Le curseur entre le bien commun et le bien intime se déplace. Les générations montantes recherchent des plaisirs plus durables que ceux fournis par le consumérisme. Ils se tournent vers le développement de l’estime de soi, celle que l’on obtient en faisant du bien à ses communautés.

Dans ce contexte, nos outils de gouvernance ne peuvent plus demeurer strictement centrés sur la propriété, mais sur le triptyque de la vie :

 

Un autre monde apparaît

Le système de régulation des outils de gouvernance s’est complexifié au fil du temps. À présent, ils ne fonctionnent plus :

  • Les priorités des Hommes changent : leurs besoins primaires étant jugés à peu près satisfaits, ils recherchent des satisfactions puisées dans les richesses immatérielles,
  • Les modes de production et de consommation sont basés sur un modèle radicalement différent : nous passons de la loi du plus fort à la loi du plus adaptable.

Avec l’émergence de l’industrie, les mécanismes monétaires s’étaient organisés autour de l’idée de la croissance infinie de richesse : toujours plus d’hommes sur terre, toujours plus de progrès. Ainsi, la finance part du principe que 2 formes de croissance se conjuguent pour assurer une expansion constante : la quantité et la qualité des biens et des services produits. La finalité : aller vers toujours plus de profit.

La croissance démographique devient un problème de capacité extractive. Alors, le progrès fait que nous cherchons à produire, des produits de qualité croissante, avec la juste quantité au bon moment et au bon endroit pour les bonnes cibles de consommateurs, en étant aussi économe que possible en ressources extractives, énergétique et humaine : soit, le contraire des exigences de notre système financier actuel.

C’est la logique de l’économie circulaire qui s’impose. En son sein, c’est la logique de l’économie de la fonctionnalité qui s’impose avec, en son propre sein la logique de l’économie servicielle qui s’impose également. De fait, l’Homme ne veut plus posséder, mais simplement disposer.

La notion de propriété se resserre autour d’objets intimes, le reste entre dans le domaine commun.

Dans le même temps, l’Homme se met à consommer des richesses de plus en plus immatérielles. La compétitivité des communautés se joue désormais sur leurs capacités à développer des talents et enraciner des savoirs, mais aussi à collecter et traiter des données pour gérer au plus près les ressources matérielles. Pour attirer et retenir les talents, il faut leur offrir une cadre de vie sociale, éducatif, culturel, sanitaire, entrepreneurial et matériel de haut niveau. Autant de richesses principalement immatérielles dans lesquelles il faut investir.

Or, les richesses immatérielles ont un comportement radicalement différent des richesses matérielles : elles se bonifient quand on s’en sert alors que les autres se détruisent quand on s’en sert. Les instruments d’échange dans ces deux types d’économie sont donc eux-mêmes radicalement différents.

À entendre le désastre du secteur de la santé, de la justice ou de la culture, il est clair que le système actuel n’est pas bien outillé pour répondre à ces défis.

 

Besoin d’argent diversifié

La monnaie actuelle est créée lorsqu’un projet est initialisé (construire une usine, un satellite et éventuellement un projet éducatif à condition qu’il soit possible de déterminer son retour sur investissement). La monnaie est ensuite détruite lorsque la richesse créée par ce projet a permis de rembourser la somme crée (en plus du paiement des personnes qui ont travaillé et fourni de la matière première ou secondaire).

Le système s’est abondamment complexifié au point d’embrouiller les acteurs de l’économie… mais dans son principe, il reste basé sur la notion de destruction et de rente, ce qui ne convient pas à l’économie de l’immatériel orienté vers le bien commun. alors, en créant de l’inflation, les organismes ad hoc (non démocratiques) mettent toujours un peu plus de monnaie en circulation espérant stimuler les capacités de production et indirectement de consommation. Mais en pratique cela ne marche pas : les prix baissent en raison des progrès et de l’évolution des priorités culturelles. Il ne s’agit pas d’un phénomène transitoire, mais de l’installation d’une nouvelle manière de penser les parcours de vie de nos concitoyens.

Effectivement, des besoins émergent et ne sont correctement servis : chacun veut réussir sa vie, c’est-à-dire donner du temps à sa famille, à la culture, aux savoirs, à l’innovation, à la démocratie ou encore à la spiritualité. Chacun veut vivre dans un environnement social et sanitaire de haut niveau. Ainsi, les progrès désirés se déplacent vers les capacités à résoudre les conflits de toutes natures : sanitaires, sociaux, juridiques, financiers.

Ainsi, le temps libéré par la chimie, les machines et les organisations optimisées (création de biens et services pour les personnes à court terme) sont à réorienter vers les tâches empathiques (résolution de conflits) et les tâches contributives (création de valeurs pour la communauté à long terme).

En résumé, l’argent dont nous avons besoin doit être diversifié pour répondre à 3 attentes au comportement économique différencié :

  • Productives : production de biens et services pour les personnes à court terme,
  • Empathiques : résolution de conflits, c’est-à-dire la gestion des risques à travers les actions prédictives, préventives et curatives.
  • contributives : création de valeurs pour la communauté à long terme, c’est-à-dire le développement des personnes, des savoirs et de leurs mises en coopération.

En résumé :

  • Les activités contributives sont celles qui construisent une compétitivité durable à l’économie « productive ».
  • Les activités empathiques sont celles qui servent à amortir les risques dus à la vie qui elle-même fonctionne en permanence sur le mode essai-erreur.

 

Actuellement, le système ne s’intéresse qu’aux activités productives. Elles seules font l’objet de récompenses. Les activités empathiques sont perçues comme des coûts à réduire et les activités contributives sont livrés au bénévolat, aux dons et aux aides qu’il faut réduire également sans cesse. Cette vision de l’économie est basée sur le court terme. Elle est donc sans avenir.

Les activités empathiques et contributives sont dédiées au développement de la communauté. Il n’y a pas lieu de les lier au système d’échange entre les blocs géopolitiques. Au contraire, basée sur la notion de solidarité, elles ont une portée locale qui peut être propagée de proche en proche de la commune au département, à la région, à la nation et finalement à la communauté européenne.

 

 

Quoi qu’il en soit, l’argent sert aux échanges :

  • entre les communautés,
  • au sein des communautés.

 

Tout individu est une richesse pour sa communauté dans la mesure où celle-ci lui donne la possibilité de libérer ses talents et faire prospérer ses savoirs pour se réaliser dans une combinaison de types d’activités : productives, empathiques et/ou contributives (cette combinaison évoluant durant son parcours de vie). S’il en est ainsi, il devient normal qu’il reçoive un revenu de base sous 3 formes correspondant aux 3 types de richesses qu’il crée et qu’il consomme. Ses activités lui donnent droit à des abondements. La combinaison d’argent qu’il utilise est détruit lorsqu’il consomme de la richesse crée.

La régulation de la masse d’argent en circulation est gérée par une instance démocratiquement élue et surveillée par trois instances distinctes (une par nature d’argent qui veille à a cohérence avec les autres formes de création de richesse).

 

L’argent devient numérique, sous forme de monnaie intelligente. Les instances coopèrent pour assurer en permanence une interopérabilité cohérente entre les différentes formes d’argent en circulation car durant leurs parcours de vie, les citoyens produisent et utilisent différemment les formes de richesses.

Ce système est conçu pour être nativement distributif et donc simplificateur en matière de fiscalité et d’aides sociales.

 

Mixer du quantitatif et du qualitatif

Le système actuel de gouvernance se caractérise par des règles et des lois : codes des impôts, lois de finances… etc. Au fil du temps, les contraintes qui en résultent deviennent de plus en plus complexes à faire appliquer et à faire évoluer.

 

De plus, aussi complexes soient-elles, ces contraintes prennent mal en compte les progrès qualitatifs demandés aux agents économiques (personnes physiques et personnes morales). Certes, des indicateurs tentent d’éclairer les progrès réalisés, mais ces indicateurs sont coûteux et portent à caution.

Les monnaies intelligentes interopérables permettent de contourner ces problèmes puisqu’elles sont capables, au moment de la réalisation d’opérations sollicitant l’interopérabilité, d’appliquer les règles en vigueur. Elles sont capables, au moment d’une transaction, de le faire en annonçant le résultat à l’avance et en l’expliquant (ce qu’un formulaire papier est incapable de faire).

 

Une économie prédictive et préventive

Le terme d’économie planifiée inspire le dégoût chez les « Occidentaux » du 20ème siècle. L’imaginaire idéologique et historique qui y est associé ne fait guère rêver. À présent, l’occident est face à un défi complexe : allier les aspirations populaires en matière d’écologie, d’équité, d’éthique et de démocratie, tout en préservant ses souverainetés respectives dans un contexte géopolitique en recomposition. Une nouvelle forme d’économie planifiée émerge (conjointement à la notion d’Etat-Plateforme).

Le numérique est un de ses alliés pour y apporter une réponse. Les données disponibles et le savoir-faire en matière de traitement de ces données permettent de se tourner vers le principe qui restructure le secteur de la santé, probablement celui de la justice et pourquoi pas celui de l’économie :

 

Dans cette approche, le prédictif est fait avec des big datas, il n’est donc crédible que sur le court terme. Il ne se substitue pas à des travaux plus long termes.

 

Construire le futur en combinant le contributif et le productif

Actuellement, le futur se construit au gré de l’inspiration de la finance. Celle-ci se concentre au point d’entraver le progrès (voir débat sur le démantèlement des GAFAM).

L’économie productive doit être celle qui exploite des idées mises au point au sein des activités contributives (aspect innovation). Elle fonctionne sur le modèle des produits marketing qui naissent, deviennent des vaches à lait, puis entrent en obsolescence tandis que de nouveaux produits entrent dans la boucle (eux-mêmes issu de l’économie contributive).

Les nouveaux produits ont été préparés dans la sphère contributive, à l’abri de la compétitivité internationale.

 

Pas de monnaie mondiale car pas de gouvernance mondiale

Les pourfendeurs du libéralisme dur rêvent d’un monde de partage. L’évolution de l’Homme semble se diriger dans ce sens : le meilleur de l’Homme se construit dans l’hybridation et non dans l’extinction des uns par les autres. Les nations qui font évoluer dans ce sens leurs instruments de gouvernance sont celles qui préparent réellement l’avenir.

Ceux qui pensent qu’une monnaie mondiale est possible se trompent d’époque. L’Homme a besoin de cadres pour évoluer. En revanche, les échanges mondiaux ont toujours (ou presque) existés. Les monnaies doivent donc être interopérables au niveau international.