Décider avec la passé récent ou le futur probable
Par genevieve-b. vendredi 13 novembre 2015, 10:55. à débattre | Lien permanent.
Philippe Aghion vient de terminer son remarquable cycle de cours au Collège de France, intitulé « Théorie & politique de la croissance ».
Dans sa séance inaugurale, Philippe Aghion a présenté sa manière de faire de la macroéconomie en confrontant des modèles théoriques à des situations empiriques.
Cela permet de voir les politiques économiques qui fonctionnent et donnent des résultats satisfaisants et celles qui au contraire s'avèrent inefficaces voire destructrice.
Il a donc exposé des théories confrontées à la lumière de nombreuses manipulations de chiffres, collectés au siècle dernier et en ce début de siècle. Ce travail immense est réalisé avec de gros moyens.
Cependant, les conclusions qui en découles ne sont pas ajustées à l’aide de considérations géostratégiques ni des mutations socioculturelles. D’une manière générale les démarches prospectives étaient peu présentes, ce qui aurait été encore plus intéressant compte tenu que nous sommes dans une période de mutation accélérée.

Par exemple, à propos de l’emploi, les propos peuvent laisser croire que le modèle du 20ème siècle se pérennise, alors que rien n’est moins sûr. Nous voyons bien que ce modèle, où la majorité des citoyens ont été protégés par le salariat, a correspondu à une forme de tissu industriel qui a vécu et qui ne reviendra pas. Il correspond à une forme de capitalisme qui va devoir cohabiter avec d’autres formes d’activités humaines devenues au moins autant nécessaires à la collectivité et qui vont devoir être dynamisées par des formes de récompenses qui restent à inventer.
Or, une équipe gouvernementale, qui a chaque jour des décisions opérationnelles à prendre, a tendance à écouter d’avantage des chercheurs dotés de gros moyens que des futurologues qui parlent d’un avenir probable sur lequel il est difficile de mener des travaux d’envergure. Idéalement, il faut écouter les deux et laisser l’intuition opérer. Mais l’intuition est un exercice qui nécessite de l’entraînement et du temps, ou bien beaucoup de débats pluridisciplinaires.