En bref

« Quand l’actualité va vite,

il faut prendre le temps de regarder loin. »

Wilson Churchill

 

Dans le droit fil de cette pensée, nous avons choisi de penser à 2050, pour suggérer des chantiers à enclencher en 2025, selon 3 axes proposés ci-dessous.

 

Répondre aux attentes des citoyens

L’évolution de la géopolitique et les constats d’un demi-siècle de mondialisation invitent à proposer des stratégies visant à développer au niveau France / Europe une nouvelle forme de souveraineté ouverte basée sur la meilleure autosuffisance possible et des offres d’exception, destinée aux échanges internationaux.

Ceci n’est pas une incantation, mais une opportunité qui s’offre à nous. Voici pourquoi et comment.

 

Poursuivre l’Histoire de l’Europe

L’ère industrielle, que nous terminons, est née en Europe. Elle a consisté à « apporter le mieux-être au plus grand nombre grâce au progrès technique ». À présent, pour progresser, nous constatons que le progrès n’est plus seulement technique. Nous : nous entrons dans la « guerre des talents » et cette guerre se gagne par l’attractivité.

L’Europe est la première zone géopolitique à être confrontée à cette mutation sociétale. Elle doit innover par elle-même.

 

L’ère industrielle s’est construite en explorant de nouvelles formes de gouvernances qui montrent aujourd’hui leurs limites (le 20ème siècle se caractérise par laune concentration de dictateurs et dele 21ème siècle débute par dégâts environnementaux ourdis durant le 20ème siècle).

NousSans renoncer à la poursuite de nos avancées, nous allons aborder ce nouveau chapitre de notre Histoire avec l’obligation de rectifier le tir en innovant sur le plan sociétal et non plus seulement financier et technologique. Par exemple en repensant la pratique du pouvoir et les mécanismes de récompense.

Le numérique est au cœur des changements qui s’impose à nous. Il est également le facteur de fabrication de solutions.

Le numérique est lui-même en mutation, ce qui offre à l’Europe la possibilité de se créer un espace numérique qui s’inscrit dans la prolongation de son évolution, en tant que berceau de la démocratie, du pacte social et des droits de l’Homme. , mais aussi du per to per et de l’Open Source.

 

Se préparer aux mutations en cours

Parler de création d’emploi en 2025 laisse les citoyens juniors et séniors sceptiques, alors qu’il y a tant de choses importantes à faire en dehors de « l’emploi » pour développer notre attractivité. Or, sans attractivité, point de produits d’exception.

Il faut donc aller plus loin dans l’idée que nous nous faisons de « l’emploi » et se doter desinventer les outils d’échange et de gouvernance qui conviennent. Le numérique nous offre de nombreuses possibilités qu’il faut explorer avant de s’en faire imposer par d’autres, plus audacieux.

Ainsi, comme souvent dans les périodes de mutation, l’innovation se situe dans des recoins qui ne sont pas dans le courant de pensée général.

Malgré l’apparition de la marine à vapeur, les grands armateurs perfectionnaient la marine à voile, la rendant plus dangereuse…

Sans renoncer à l’élan scientifique dans laquelle la France et l’Europe consolident sonleur expertise, le terrain d’innovation qui se présente à nous est de portée sociétale, adossé du numérique.

Ceci passe par la conception et le développement d’instruments d’échange visant à faciliter le fléchage du temps rendu disponible grâce aux progrès dans les modes de production et de consommation, vers les tâches « empathiques » et « contributives ».[1] » et « contributives[2] », c’est-à-dire des richesses immatérielles et fondamentalement locales, au comportement, économiques radicalement différentes de ce que nous produisons dans le monde productif.

CeciDévelopper ces outils va nous amener à faire des progrès de toute nature, en particulier en matière de numériques. Ceci donnera un élan global à notre industrie et à nos pôles de savoirs.

 

 

 

 

Contributions aux questions soulevées

 

 

Atteindre le plein-emploi d’ici 2025

Une mutation qui touche nos outils de gouvernance

Notion d’emploi au 21ème siècle

La notion d’emploi est en mutation : le modèle du 20ème siècle ne convient plus aux aspirations des citoyens, mais aussi aux exigences de flexibilité et d’évolutivité auxquelles sont soumises les entreprises et les administrations.

En effet, l’Homme a développé le numérique pour se libérer des tâches fastidieuses, hypercomplexes, dangereuses ou dégradantes. Si possible, il ne conserve que les tâches créatives, décisionnaires et managériales. Ceci pose un problème de réorientation des capacités à contribuer à la vie sociale et économique. En effet, nous allons consacrer moins de temps à produire, mais dans le même temps, nous avons besoin de consacrer plus de temps au développement du bien commun. Notre paradigme n’est pas conçu pour cela.

Ce mouvement s’inscrit dans le sens de l’Histoire des Hommes. Il est inutile de lutter contre ce mouvement de fond. Au contraire, il faut en tirer des avantages compétitifs.

Le basculement géopolitique majeur qui s’offre à l’Europe, plus largement pour l’Occident et à travers le reste du monde combine deux nouveautés basées sur le numérique :

  • Le développement de l’économie circulaire s’impose pour des questions environnementales et sociétales, mais aussi de souveraineté. Elle consiste à produire la juste quantité au bon moment et au bon endroit pour les bonnes cibles en étant aussi économe que possible en énergie, en ressources extractives et en intervention humaine. Les nations qui renoncent à l’économie circulaire voient leur souveraineté se fragiliser.
  • La robotisation élève la qualité tout en réduisant les coûts. et donc les prix. Les nations qui renoncent à la robotisation voient inexorablement leur compétitivité s’effondrer.

 

En première analyse, cette réalité présente 2 problèmes majeurs :

  • L’effondrement de la classe moyenne : un nombre croissant de tâches sont déléguées aux machines. L’Homme se réserve les jobs « de rêve », mais il reste néanmoins des tâches que les machines ne savent pas encore accomplir (les jobs « de merde »). Entre les deux : rien, ou si peu !

LesCertes, les plus prompts à maîtriser la robotisation affirment, chiffre à l’appui, qu’ils créent des emplois dans leur entourage, ce qui est vrai, mais cela se fait en détruisant l’emploi des concurrents moins audacieux. Au final, il y a bien destruction d’emplois.

L’emploi tel que nous l’avons stabilisé durant le 20ème siècle disparaît, mais en plus, il devient instable. En effet, ni les bons jobs, ni les mauvais ne peuvent être pratiqués durablement : on ne peut être créatif à jet continu et on ne peut accomplir une tâche abrutissante toute sa vie au 21ème siècle.

  • L’effondrement des prix : l’économie circulaire permet à l’Occident, et à l’Europe en particulier, de se départir de sa dépendance vis-à-vis des « ateliers du monde » tout en faisant baisser les prix de revient.

Dans le même temps, les consommateurs se mettent à consommer moins mais mieux et à mutualiser leurs investissements (via l’économie de la fonctionnalité et servicielle). La logique du « toujours plus » sur laquelle repose notre « monnaie dette » ne fonctionne plus, laissant augurer des turbulences graves, combinant plusieurs facteurs sociaux et financiers.

Dans cette nouvelle forme d’économie, les ménages se dépatrimoinisent tout en devenant précaires, étant de moins en moins fidèle à une entreprise ou une administration. en matière de revenus, suite au délitement réciproque de la fidélité entre employeur et employés. Un nouveau pacte social est donc à réinventer.

Cette réalité est niée par les institutions, mais pas par les citoyens qui ont tous dandans leur périmètre des jeunes sous employés, des seniors en souffrance sociale ou encore des salariés écœurés … leur parler de plein-emploi, c’est s’afficher « France d’en Haut ». Il faut aller vers un discours plus réaliste.

Il faut aller vers un débat plus réaliste et constructif : on ne lutte pas contre le progrès, on s’y adapte, on en fait même une opportunité. Ce ne sont pas les citoyens qui doivent s’adapter au libéralisme qui ne correspond plus à la réalité, mais au libéralisme de s’adapter à la diversification des formes de prospérités.

 

Segmentation de l’économie

En analysant la situation sous un angle anthropologique, nous voyons se dessiner une segmentation de l’économie selon trois axes complémentaires :

  1. L’économie productive qui a pour vocation in fine de satisfaire les besoins primaires des individus. Cette forme d’activité est la base de notre système économique actuel.
  2. L’économie contributive qui a pour vocation de développer le bien commun. Cette forme d’activité est actuellement dévolue au bénévolat et au volontariat.
  3. L’économie empathique qui a pour vocation de prévenir et de traiter les crises de toutes natures : sanitaire, juridiques, financières, environnementales … etc. Cette forme d’activité est d’une utilité croissante dans une population confrontée à l’abstraction et aux évolutions très rapides. qui suscitent de nombreuses distorsions tant au niveau des institutions que des individus. Financée « en perruque » par le système elle est actuellement en souffrance (santé, justice, enseignement, social …).…), alors qu’elle devient un élément clef de la compétitivité (maison France efficace, énergies libérées, rancœurs désamorcées).

Ainsi, nous devons diversifier notre modèle économique pour qu’il reconnaisse des créations de richesses de nature et de temporalité différentes., tout en distinguant la notion de « local » et « d’universel ».

 

Perspectives d’une nouvelle forme d’abondance

Les deux causes d’effondrement (les emplois et les prix) que nous venons d’évoquer seraient alarmantes si nous n’écoutions pas les générations montantes : elles entendent « réussir leur vie ». Elles considèrent que la satisfaction des besoins primaires du plus grand nombre devient une affaire d’optimisation qui pose encore des problèmes passionnants à résoudre. Mais, trouvant que le consumérisme ne procure pas de satisfactions durables, elles cherchent à développer de l’estime de soi, c’est-à-dire la gratitude que l’on obtient en donnant du temps, du savoir et de la créativité au développement du bien commun.

Ceci tombe plutôt bien car la nouvelle compétitivité qui va permettre aux nations de progresser va évoluer de manière à combiner la production de suffisance et la production qualitative. Cette dernière, la notion de matériel et d’immatériel, la notion de local et d’universel …

Cette forme d’économie nettement plus complexe que celle qui nous a portés jusqu’à la fin de l’ère industrielle requiert un terreau social et culturel de haut niveau. En clair, chaque zone va progressivement fabriquer ses yaourts et ses avions. L’autarcie étant mortifère, elles vont échanger des matières premières et des produits d’exception. Pour produire des produits d’exception au 21ème siècle, il faut disposer de talents et de savoirs. Il faut proposer aux générations montantes un modèle sociétal attractif pour les attirer et les faire prospérer.

Les civilisations se construisent autour d’une source de prospérité. Celle que nous avons à construire concerne les talents, les savoirs et la maîtrise des données indispensable, indispensables à la gouvernance de notre vivre ensemble.

 

Repenser notre pacte social

La stratégie d’accumulation de savoirs et de talents se joue de deuxtrois manières :

  1. Soit en ayant une population pléthorique, ce qui n’est plus une option pour l’occident,
  2. Soit en attirant des savoirs et des talents, ce qui est important pour nous tant que notre taux de fécondité ne nous est pas favorable (< 2,1). Cette option nous incite à être attractifs en offrant un cadre de vie social et culturel de haute qualité,
  3. Soit en faisant fructifier le plus possible sonnotre vivier potentiel de talents.

Pour la seconde option, qui nous concerne plus particulièrement,Pour l’option « c », il faut permettre à chacun de donner le meilleur de lui-même durant les 6 étapes de son parcours de vie :

  1. Je nais : j’ai besoin d’amour et de soins,
  2. J’apprends : j’ai besoin d’espaces d’initiatives,
  3. Je fais : j’ai besoin de réseaux pour me former et pour évoluer,
  4. J’innove : j’ai besoin de croiser les savoirs et mutualiser les moyens,
  5. Je transmets : j’ai besoin de lieux d’échanges,
  6. Je me rends utile et bienveillant : j’ai besoin de proximité avec mes semblables et d’accompagnement matériel et affectif.

 

Le modèle social actuel ne récompense que l’étape 3. De plus, il est mal outillé pour faire face aux nouvelles réalités : carrières en forme de confettis avec virements de bord multiples.

Les étapes 2, 4, 5 et 6 sont mal, ou pas outillées du tout, alors qu’elles ont pour finalité, dans le cycle de la vie, de favoriser la contribution à la vie sociale et économique. Elles sont, pour une large part, considérées comme relevant du bénévolat et du volontariat. C’est-à-dire qu’elles sont considérées comme ne créant pas de valeur. et même comme un coût / business (étapes 1 et 6).

Le volontariat n’est pas stable puisque au moindre incident, le volontaire se replie. Il faut donc en permanence renouveler le cheptel de volontaires.

Le bénévolat introduit toutes sortes de dérives puisque les intéressés y poursuivent des objectifs personnels qui ne sont pas nécessairement concordants avec l’objet de l’association dans laquelle ils s’impliquent.

 

En réalité, ces tâches deviennent nécessaires au bon fonctionnement de la vie socio-économique et pour prévenir et gérer les tensions croissantes sur le plan social, sanitaire, financier et cognitif. Elles sont également nécessaires pour assurer une continuité harmonieuse de la transmission des savoirs et de l’expérience acquise. Elles doivent donc être prises en compte par le système sociétal.

La notion de « plein-emploi » en 2025 ne ressemblera donc pas à celle que nous avons connue au 20ème siècle :

  • Elle ne doit plus seulement reposer sur la production sans fin de biens et de services productifs,
  • Elle doit intégrer aussi les sous-jacents de la compétitivité :
    • Les tâches contributives (celles qui enrichissent le bien commun),
    • Les tâches empathiques (celles qui résolvent les crises de toutes natures).

 

Imaginer de nouveaux outils de gouvernance

Ces deux nouvelles contraintes donnent lieu à des travaux de recherche insuffisamment explorée en France :

  • Conscient du désastre de la robotisation sur le marché de l’emploi, certains travaillent sur le revenu de base. Mais on sait que cette approche n’est pas acceptable socialement : le revenu permet certes aux citoyens d’être admis dans la communauté économique, mais le travail permet d’exister socialement et même d’évoluer. Ce mécanisme de réciprocité doit être préservé à tout prix.
  • D’autres sont conscients que la monnaie dans sa forme actuelle n’est pas adaptée aux nouvelles formes de création de richesses immatérielles. En effet, celles-ci ont un comportement radicalement différent des richesses créées dans le monde productif. Ils cherchent à développer des monnaies intelligentes qui favorisent la biodiversité économique. en introduisant des paramètres tels que le local, le bien commun, le qualitatif, le niveau de risque ...
  • Enfin, conscient des limites du système fiscal et du système distributif qui atteint un niveau de complexité exagéré, certains réfléchissent à d’autres approches, désormais à portée de main avec le développement du numérique.

Ces trois chantiers n’en font qu’un. C’est en les rassemblant qu’il va être possible de prendre en compte et même d’optimiser les « carrières en forme de confettis, avec virements de bord multiples »», en les étalant sur plusieurs plages du parcours de vie, et plusieurs formes d’échanges de richesses créées tout en contribuant ainsi à enraciner les savoirs et en faisant prospérer les talents.

La conception d’un nouveau pacte social nécessite de l’audace et de la créativité. Les monnaies intelligentes nous ouvrent des perspectives qu’il serait impardonnable d’explorer.

L’Europe est le coin de la planète qui a historiquement été toujours en pointe sur ces sujets. Berceau de l’économie libérale, mais aussi de l’économie planifiée, elle est la plus à même de travailler sur le nouveau paradigme, n’ayant jamais totalement adopté l’un ou l’autre de ces deux modèles de manière exclusive.

 

 

Ce chantier nécessite de rassembler de nombreuses disciplines et donc de créer un cadre spécifique où se croisent des chercheurs institutionnels et des chercheurs indépendants.

Cette innovationCet espace d’innovations n’est pas seulement technologique, mais aussi sociale et sociétale. ElleSitué au cœur des réflexions des citoyens, il constitue un projet fort, capable de mobiliser les meilleurs talents et beaucoup d’énergie.

ElleIl est vitalevital pour aborder les mutations en cours et encourager les citoyens à contribuer efficacement au projet de société qui nous convient.

 

 

Donner du grain à moudre à nos innovateurs

Pour innover, il faut chercher à résoudre des problèmes. On acquiert ainsi des savoirs et des outils qui peuvent ensuite s’appliquer à bien d’autres contextes. Repenser le pacte social et ses outils de gouvernance constitue un vaste chantier à partager avec l’ensemble des Européens. En effet, l’Europe, berceau de l’ère industrielle qui, a bousculé ses modes de gouvernance pour explorer une certaine forme de démocratie, et une vision de l’économie aujourd’hui perçue comme sans issue. Elle doit à présent reprendre le cours de son histoire en explorant un nouveau mode de gouvernance basé sur les organisations organiques et mise en synergie selon un modèle fractal inspiré de la nature :

Notre corps fonctionne en mode organique : aucun organe ne gouverne tous les autres même si certains ont des fonctions de régulation. Comme le plus petit des organismes vivants, notre corps possède un mécanisme d’homéostasie qui a pour fonction d’évaluer les changements d’environnement. Si le changement semble mineur ou lent, il peut décider de ne pas engager un processus d’adaptation. En effet, s’adapter, c’est prendre un risque. Les entreprises se transforment inexorablement en mode organique avec la notion de « mission ».

Par « fractale », il faut entendre une organisation qui s’organise de proche en proche pour aller du plus près de la matière au plus près du spirituel. L’Europe à cet égard est la plus avancée en la matière.

Les petites entreprises sont naturellement plus réactives parce que leur homéostasie est mieux perçue collectivement. Un tissu d’entreprises petites et donc réactives est lui-même plusdonc réactif, à condition que ce tissu soit piloté de manière collégiale.

 

Tout ceci devient possible en s’adossant à une architecture système distribuée et efficace (voir « L’EtatL’État facilitateur »).

 

Volet Numérique

Adapter les forces vives aux besoins de l’économie numérique

Le numérique est désormais partout dans nos vies sociales et économiques à travers 3 composantes :

  1. Les machines et les réseaux,
  2. Les logiciels,
  3. Les données.

Pour chacune de ces composantes, le niveau sur lequel nous devons raisonner est Européen, avec un souci de souveraineté et de réciprocité pour les échanges extérieurs.

 

Réseaux & machines

Forum Atena s’exprime à longueur d’années sur ce sujet (voir la synthèse du Grand Débat National des Think Tanks du Numérique) :

  • Nous devons reconquérir au niveau UE notre autonomie hardware. L’innovation évolue selon le processus essai / erreur avec des paliers de stabilisation durant lequel un ou quelques leaders s’imposent. Inutile de courir derrière ces leaders, mieux vaut attendre leur obsolescence et préparer le « coup d’après ». C’est précisément ce qu’il se passe actuellement en matière d’intelligence partagée par opposition aux machines conçues pour la concentration tous azimuts.
  • Faire évoluer nos réseaux et notre manière de facturer leur utilisation de manière à ce que les éditeurs de services en ligne soient impliqués dans la surconsommation de bande passante qu’ils suscitent à leur profit. Cette manière de faire va avoir pour effet de réduire les volumes inutiles et les documents de moindre intérêt, ce qui sera bénéfique pour l’environnement et la protection des données.

 

Logiciels et usages : inspirons-nous de l’école de Jules Ferry

La richesse des logiciels disponibles dans nos machines est sous-employée, alors que, souvent, nous payons au prix fort les licences qui y sont afférentes.

Il y a sans doute un peu de paresse, mais surtout pas d’infrastructures pour permettre aux étudiants, aux startupers, aux employés ou encore aux particuliers de se former et de s’informer.

Un bon usage des logiciels représente des gains d’efficacité étant considérables pour la « maison France ». Il semble donc nécessaire de se pencher sur la manière de faire des centres dédiés en utilisant par exemple les CCI pour les entreprises et les « maisons de famille » pour les particuliers.

De nombreuses tentatives existent, mais elles sont atomisées et butent sur des aspects de financement. Elles butent aussi sur le recrutement de ces formateurs alors que les ressources humaines sont disponibles dans la population en phase 2 et 5 (voir « Repenser notre pacte social » page 5).

Ces espaces ont pour vocation de susciter de l’appétence, écouter les besoins et les difficultés, y apporter des réponses et communiquer des recommandations à destination des réseaux de startups pour inspirer des créations de solutions nouvelles ou des adaptations.

Lorsque JuleJules Ferry a rendu l’école obligatoire et gratuite, il avait pour mission d’adapter la population aux nécessités, pour les entreprises naissantes, de disposer d’employés sachant lire, écrire et compter.

À présent, nous avons besoin d’une population autonome et avertie en matière de numérique.

Outre la formation et l’information, ces centres doivent avoir une vocation d’éveil aux travers du numérique et de ses dangers.

 

Données et confiance : les nœuds de données

Les données sont perçues comme la source de vie pour nos entreprises et nos collectivités. Il en va de même dans la nature. Un courant d’influence pousse au développement de l’Open Data, mais il suscite de la résistance et c’est en réalité une bonne chose.

En effet, donner ses données, c’est vendre son âme et devenir manipulable. Les données doivent s’échanger dans un climat de réciprocité. Sans cette réciprocité : pas de confiance. Sans confiance : pas de fiabilité.

Quelle valeur donner à des fichiers bâtis à partir de réseaux sociaux dont on sait que près de 30% contiennent des fantômes ?

Les échanges de données deviennent indispensables, mais cela doit se faire dans un contexte de réciprocité et de fiabilité. Forum Atena travaille actuellement sur le concept de « nœud de données » qui permet d’encadrer cette activité en passe de devenir stratégique pour notre efficacité globale.

 

Le temple de la donnée publique en France s’appelle l’INSEE. Sa manière de collecter et de traiter les données est fortement institutionnalisée alors que l’agilité est de mise dans bien des contextes (chercheurs, industriels, collectivités, presse, universitaires …). Le contournement consiste à aller chercher des données ailleurs, et c’est ainsi que des décisions sont prises en s’appuyant sur des supposées connaissances de profils qui vivent à l’autre bout du monde ! … alorsAlors de l’ensemble de nos organisations à elles toutes détiennent l’ensemble des données dont nous avons besoin.

Ce trafic de données va devenir de plus en plus insupportable au fur et à mesure que nous y adossons des prises de décisions de plus en plus précises.

Voilà pourquoi ce concept de nœud de données va devenir stratégique.  

 

Donner de la noblesse aux métiers du numérique

N’est pas informaticien qui veut ! Le coding nécessite une forme d’esprit que le système scolaire ne sait pas détecter. De plus au fil du temps, les métiers liés au numérique se diversifient (un peu comme les spécialités en médecine). Repérer les talents potentiels devient chaque jour plus complexe.

Ces métiers, comme en médecine, nécessite des bases et beaucoup de pratique. Pour les plus doués, il est possible d’approfondir. La structure éducative n’est pas adaptée à cette nécessité de progressivité.

 

Un informaticien capable de tomber en pâmoison devant un assemblage de lignes de codes est un artiste, souvent même un héros méconnu. Nous n’avons pas de héros connus auxquels les générations montantes peuvent s’identifier et se comparer.

 

Un informaticien peut être aussi un voyou, ce qui pose de graves problèmes car de plus en plus le code devient la loi de fait, n’en déplaise aux juristes. Il n’existe pas d’ordre des informaticiens.

 

Un bon informaticien est créatif et produit du code fiable et facile à entretenir. Un mauvais informaticien peut coûter très cher à son employeur ou son client. Gérer des informaticiens, c’est gérer des talents et des expertises, un peu comme dans le monde du cinéma. Or, le cinéma s’est structuré à travers un réseau d’agents qui ont pour vocation de faire fructifier les talents qu’ils ont repérés en les impliquant dans des projets variés et ambitieux. Il serait opportun de s’en inspirer, pour faire fructifier le nombre croissant d’informaticiens à leur compte afin qu’ils développent des expertises de plus en plus pointues[3].

Le statut d’autoentrepreneurs n’est pas satisfaisant, tant sur le plan de la protection sociale, que sur le plan du développement du patrimoine. En ne récupérant pas la TVA, ils sont peu incités à investir sur leurs outils, leur formation et leur marketing[4].

 

Créer un environnement favorable à la croissance des entreprises de l’économie numérique

La Silicon Valley a construit sa puissance en déroulant un processus implacable :

  • Un objectif stratégique : remplacer les « grandes oreilles » par un instrument d’influence massive afin de favoriser la conquête culturelle et commerciale du plus grand nombre possible de coins de la planète.
  • Une politique de développement : les étapes ont été décortiquées de manière à établir une stratégie de repérage des talents capables d’imaginer, puis développer, puis exploiter le système. En parallèle, une stratégie de financement des essais / erreurs a été mise en place, combinant des marchés publics et des investissements privés sécurisés par les plans stratégiques.
  • Un maillage des startups : pour obtenir un effet « normes de fait », les startups sont encouragées à échanger des facilités d’interopérabilité.
  • Un mécanisme de recyclage des startups malheureuses : l’erreur a été décrite comme une opportunité d’apprentissage. Fermer une startup n’est pas une source de tracas dévastateurs comme savent en organiser les tribunaux de commerce français : les savoirs et les brevets sont protégés et remis au pot commun. Comme pour les cavaliers, l’important est de remonter le plus vite possible « à cheval » … Avant que les idées ne refroidissent !
  • Une pratique de l’agrégation : enfin, adossé au vivier de startups, quelques poids lourds dûment capitalisés par des investisseurs souvent anonymes, agrègent les startups de la vallée, mais aussi d’autres « scoutées » dans le monde entier, afin d’enrichir sans cesse les fonctionnalités de ces poids lourds.

Mais, le numérique actuel, quasiment bipolaire (Occident / Asie) commence à se solidifier. Ceci offre une belle opportunité pour l’axe Europe / Afrique. Mais pour en profiter, il convient d’établir une stratégie inspirée de nos aînés (les GAFAM).

 

Fabriques (numériques) des territoires

Ce projet, en cours de lancement, pourrait être étoffé pour devenir ces lieux où sontest pensé le tissu économique du territoire, puis structuré, suscité, conçu, initialisés et recyclé les projets de startups qui conviennent.

Les Think tanks du numérique sont en mesure de s’impliquer dans la conception expérimentale d’un tel lieu pour une région pilote.

 

 

Saisir notre opportunité

Nouvelle priorité, nouvelle architecture

La question qui se pose à nous consiste à définir un projet global et néanmoins consensuel, pouvant se décliner sur 1 ou 2 continents (Europe / Afrique). Il s’agit de préparer l’après GAFAM / BATX dont les architectures, centralisatrices, datent du 20ème siècle et arrivent au bout de leur capacité d’évolution sur à peu près tous les plans.

Nous avons les savoirs et les talents pour nous lancer dans une architecture modulaire et donc évolutive, efficace et respectueuse de l’environnement et des personnes. D’ailleurs, les briques commencent à se développer à travers l’Europe et certains pays Africains. Il suffit d’amplifier ce mouvement.

Étant évolutives les architectures systèmes qui nous intéressent sont plus faciles à développer et à financer et favorables à la coopération.

D’ailleurs, l’Europe est déjà à la manœuvre à travers l’expérimentation grandeur nature estonienne (X-Road) qui a construit un système en nid d’abeille modulaire et difficile à attaquer (il faudrait s’en prendre à toutes les cellules à la fois) (voir ci-après la contribution spécifique de Forum Atena auquel se joint French Road).

 

L’Etat facilitateur

En France, l’association French Road réactualise cette architecture X-Road de l’Etat Estonien : elle a été construite il y a déjà plus de 10 ans, de manière à la rendre plus modulaire et scalable :

https://www.french-road.fr/actualites/2019-03-09-grand-debat-think-tanks/

À partir de ce type de plateforme, toutes sortes de dynamiques numériques peuvent se développer à grande vitesse, plus vite encore et à moindre coût que ce que l’on sait faire autour de GAFAM, avec la sécurité en plus des données et le respect des personnes et de l’environnement.

En se lançant dans un tel projet, l’Etatl’État répond aux souhaits du plus grand nombre de startups, d’associations et sans doute d’entreprises à partir du moment où elles en auront compris l’intérêt. Il libère du temps pour les assujettis et allège leurs tracas. Mais pour se lancer dans une telle aventure, même progressivement (ce qui est recommandé), il doit en parallèle repenser le pacte social, en particulier celui des fonctionnaires.

 

Financement des start-ups

Le constat

La France est réputée pour être un nid douillet pour les startups, tant l’impression d’obtenir des aides de toutes natures est entrée dans l’imaginaire collectif. Elle est hélas aussi le mouroir des projets qui abordent la « vallée de la mort » (l’étape juste avant le seuil de rentabilité). Ceci s’explique de différentes manières, dont la plus connue est la difficulté à obtenir la confiance des grands donneurs d’ordre, mais dont la plus sous-jacente est liée à l’absence de politique industrielle.

Le diagnostic

Imaginez un jardinier qui jette des graines au petit « bonheur la chance » et se réjouit de voir poindre une carotte ici, une fleur là… Il n’a pas un potager, mais des plantations ingérables. La bonne pratique est autre. En effet, il faut réaliser plusieurs projets pour atteindre la maîtrise d’une technique, d’un marché, d’un basculement culturel… etc. Il faut donc construire son tissu entrepreneurial avec patience et pugnacité.

Ceci passe par la réponse à une série de questions : quel est notre objectif à 30 ans, 60 ans et 90 ans ? De quoi avons-nous besoin pour commencer ? Quels sont les travaux qui vont être lents ? Quelles sont les ressources qui nous manquent ? …

 

Les conditions de succès

Actuellement, nous ne recyclons pas nos startups : nous les laissons grandir et mourir. Il ne s’agit pas d’enrégimenter la créativité des startups. Il s’agit seulement de leur proposer d’apporter des réponses au projet global poursuivi au niveau de la France et de l’UE en ne perdant pas les enseignements des expériences infructueuses, ni les apports partiels des tentatives échouées.

Le recyclage permet de substantielles économies qui rendent plus efficace l’usage des aides publiques et des financements privés. Il doit se jouer dans les tribunaux de commerce et dans les incubateurs. Pour cela, il faut faire évoluer les objectifs, les moyens, mais surtout les profils et les savoir-faire de ces organismes.

 

Développer des technologies et infrastructures stratégiques pour le numérique

Le siècle qui commence se caractérise par l’intensification de la guerre des talents et des savoirs. Si au 20ème siècle la stratégie a consisté à favoriser des grandes entreprises capables d’aller à la conquête des marchés mondiaux, celle du 21ème siècle va être radicalement différente : il s’agit d’avoir, outre des matières premières (premières), des produits d’exception à proposer au reste du monde.

Pour cela, il faut attirer et développer des talents et des savoirs et les enraciner. Les talents et les savoirs se développent difficilement dans des grandes structures où leur travail est noyé dans la masse, ce qui affaiblit leur quête légitime et nécessaire d’estime de soi.

Dans le même temps, perdre le contrôle d’une grande entreprise constitue un choc social et économique pour le pays d’origine.

C’est la raison pour laquelle les économies robustes vont se développer en « nid d’abeille », c’est-à-dire en forme de tissu d’entreprises, astucieusement liées entre elles par des contrats de partenariat. Cette structure est beaucoup plus difficile à attaquer et nettement plus facile à faire évoluer. L’adopter, c’est jouer sur les deux registres du succès : protection et évolutivité.

L’industrie Française doit pouvoir profiter de sa phase de reconstruction pour se mettre en synergie avec le reste de l’Europe et la pensée du 21ème siècle.

 

Les industries numériques innovantes susceptibles de créer le plus d’emplois dans les territoires

La stratégie proposée ci-dessus n’a pas pour vocation de créer plus d’emplois qu’une autre stratégie. Elle a pour but de sécuriser les composantes de notre souveraineté numérique. Sans souveraineté numérique, les emplois dans de nombreux autres secteurs sont sans garantie d’avenir.

Le numérique pénètre nos vies dans les moindres recoins, tant pour accomplir des tâches que pour collecter des données. Il se loge dans des équipements intelligents, dont la conception et la réalisation nécessitent des expérimentations. Tout passe par les POC (preuves du concept). Cette étape est rarement faite en France, un peu en Europe est majoritairement en Asie, en Chine en particulier. En effet, les tarifs pratiqués sont près de 4 fois inférieurs à ce qui se pratique en Europe.

En cassant les prix, la Chine s’offre du savoir-faire qui arrive dans les meilleures conditions puisqu’elle a accès aux créateurs avec qui elle collabore.

Ceci n’est pas sans rappeler l’erreur de nos décideurs qui se réjouissaient d’acheter leurs panneaux solaires chinois « subventionnés ». En effet, la Chine ne subventionnait pas ces produits, elle ne nous répercutait pas les coûts d’acquisition des techniques de production et de ceux de pénétration des marchés … autantAutant de richesses immatérielles dont nous nous privions.

Nous devons considérer que nous ne sommes pas moins habiles que les chinois. Nous devons nous doter de la logique financière qui permet de financer et protéger cette forme de création de richesse (voir « Imaginer de nouveaux outils de gouvernance » page 5).   

Cette réalité constitue une vulnérabilité majeure pour notre capacité à innover : celui qui réalise le POC fini par en savoir plus que le concepteur du produit. Il est temps de redévelopper cette industrie et de la fiabiliser sur notre territoire.

Reprendre la main sur l’industrie du POC revient à rapatrier des emplois qui n’auraient jamais dû partir.

 

Penser Europe d’abord

L’actualité géopolitique nous indique que dans les décennies à venir, les affrontements économiques, sociaux et éventuellement militaires vont se jouer au niveau des blocs géopolitiques.

Dans cette optique, nous devons penser Europe, tantôt en construisant des projets communs, tantôt en partageant les expertises en exploitant au mieux les spécificités locales et en organisant le plus possible nos propres suffisances.

Dans tous les cas de figure, nous devons jouer la carte de l’interopérabilité bien comprise.

 

Favoriser les relations entre la recherche académique, les grands groupes et les start-ups pour assurer le développement de technologies numériques de rupture.

Une innovation reçoit le label « de rupture » a posteriori, rarement a priori. Les innovations de ruptures se font par agrégations d’innovations et émergent lorsqu’elles se situent dans un contexte devenu favorable à son développement massif.

Ainsi, pour obtenir une innovation de rupture, il faut identifier une mutation, favoriser son avènement et y apporter des solutions technologiques et sociales. C’est typiquement ce qui pourrait être fait avec les outils de gouvernance évoqués plus haut (voir « Imaginer de nouveaux outils de gouvernance » page 4).

Ce qui compte, c’est la capacité à se diriger vers un objectif partagé au niveau de la nation et de l’UE.

 

Les innovations peuvent venir de partout : du monde académique, des grandes entreprises mais aussi, et même souvent, de chercheurs indépendants (hors système), mus par une intuition incomprise par les institutions.

Si aux siècles précédents, le savoir était une affaire d’élite dont on pensait qu’elles pouvaient avoir plus d’idées que les autres, en matière de numérique, le savoir est diffus parmi les praticiens, les chercheurs, les universitaires et les utilisateurs.

Le schéma confortable, qui consiste à dresser quelques passerelles entre les chercheurs institutionnels et les entreprises, n’a pas cours dans le numérique. Ce sont donc vers des structures ouvertes qu’il faut se tourner en organisant la complémentarité :

  • Les chercheurs indépendants placés en situation de travailler « hors du bac à sable »,
  • Les chercheurs institutionnels les plus à même de fiabiliser les hypothèses,
  • Les chercheurs entrepreneuriaux les plus à même de concrétiser.

La réalité est encore plus complexe car le numérique s’applique à tous les domaines. Les projets doivent donc être ouverts aux talents les plus improbables, les ingénus comme les super-experts.

 

 

Favoriser une approche multidisciplinaire et multiprofil de l’innovation

Une vision purement technicienne de l’innovation n’est pas suffisante. La technologie doit être placée dans un cadre bien plus large, en incluant les dimensions anthropologiques, managériales, et même diplomatiques et en relation avec la Défense – car, comme les EtatsÉtats-Uniens et les Chinois l’ont bien compris depuis longtemps, il n’est pas de technologie sans stratégies d’influence ni enjeux de souveraineté.

D’où l’intérêt de rassembler dans des lieux de formation multidisciplinaires, de puissants facteurs de fécondation en croisant des étudiants, des seniors et des formateurs de disciplines entièrement différentes sur des chantiers entrant dans une stratégie globale. Certaines universités américaines et israéliennes associent sur un même campus technologie de haut niveau, management, relations internationales, administration, sciences humaines et psychologie, économie… Nous pourrions nous en inspirer utilement, en rupture avec la conception trop souvent en silos de notre culture universitaire.

Il faut cesser de se focaliser sur le cursus des innovateurs potentiels. Ce qui compte vraiment, c’est leur inspiration et leur détermination à avancer sur des problématiques qui font sens par rapport à notre homéostasie collective. Il faut considérer que certains sont plus méthodiques, d’autres plus pragmatiques, d’autres encore plus audacieux… etc. Par itérations successives, à eux tous, ils parviendront à nous faire faire des progrès intéressants. En formulant le progrès ainsi, il devient évident qu’il n’y a pas que le « vainqueur » (celui qui a décroché le pompon final) qui doit remporter la mise. Notre vivre ensemble, dans une société mature ne se pilote pas comme un jeu de foire.

 

 

Freins à l’adoption des nouvelles technologies numériques (cloud, intelligence artificielle, internet des objets, etc.) par les acteurs économiques.

Avoir une stratégie numérique, c’est pour ainsi dire avoir une stratégie industrielle, tant le numérique est désormais omniprésent dans notre vie sociale et économique.

Durant les décennies précédentes, nos chefs d’entreprise ont développé le réflexe de se méfier de la startup innovante qui n’a encore rien démontré. Alors, la préférence est alors donnée à une entreprise étrangère proposant une offre finalement moins évoluée, mais mieux marquetée…

À présent, le contexte commence à changer avec prise de conscience des effets de la fuite des données. Il faut accompagner ce changement qui constitue une opportunité de redéploiement des filières françaises et Européennes.

Encore faut-il créer de la confiance en fiabilisant la profession (voir «Donner de la noblesse aux métiers du numérique » page 5).

 

S’assurer que les start-ups créées par les ingénieurs français ont un lien privilégié avec les industriels nationaux…

Au 19ème siècle, il a été demandé aux Français des sacrifices pour faire émerger un tissu industriel capable de rivaliser avec nos voisins. La promesse était : « le mieux-être pour tous grâce au progrès technique ». Le mot « technique » donnait carte blanche aux ingénieurs.

Arrivés au 21ème siècle, la technique fait peur. L’ingénieur n’a plus carte blanche. Il doit collaborer avec des cursus moins cartésiens et plus sensoriels et créatifs ou prospectifs.

Comme indiqué au début de ce mémo (voir « Atteindre le plein emploi d’ici 2025 » page 2), les startups doivent pouvoir être en interaction entre elles, pas seulement avec les « industriels nationaux » : c’est en construisant un maillage d’interopérabilité que le tissu entrepreneurial devient robuste.

La France ne doit plus être une « ferme de startup du numérique », mais au contraire le tisserand d’une industrie déterminée et cohérente pour sa suffisance vitale et ses propres besoins globaux, mais aussi pour ses marchés extérieurs.

L’économie actuelle tient encore grâce aux grands industriels. Il leur revient de faciliter l’installation du tissu qui va les relayer progressivement à horizon 30 ans (2050). Ceci suppose qu’ils acceptent de jouer le rôle de terrain d’expérimentation. En cas d’incident avec une startup, leur rôle de tuteur peut être reconnu est indemnisé sous certaines conditions de sincérité.

 

Volet innovation

Pour un ministre de l’innovation

Si depuis le 19ème siècle, la compétitivité des nations et des blocs géopolitiques s’est jouée autour de la finance, à présent, elle se joue sur la capacité à innover.

Le management de l’innovation requiert un savoir-faire et des talents spécifiques. L’innovation, se nourrit de découvertes, d’identifications de besoins de changement, d’opportunités conjoncturelles … On ne peut innover tous azimuts. Il faut construire des stratégies et les dérouler avec souplesse et détermination : pas facile !

Veille géopolitique, technologique, économique, sociétale, mais aussi éthique constitue le cœur du métier. La futurologie cybernéticienne a été conçue précisément pour construire ce type de stratégies et se mettre à l’écoute active du terrain, qui constitue une source d’inspiration vitale.

Ce ministre devrait avoir en charge la construction de ces stratégies, mais aussi gérer le droit d’innover.

Les Anglais nous montrent la voie : ils permettent à des innovateurs d’innover dans des contextes délimités et pour des durées également délimitées. Ceci est indispensable pour s’inscrire dans les processus essai / erreur que nous enseigne avec succès (et parfois lenteur) la nature.

 

Ce ministre ne doit pas se laisser impressionner par les annonces tonitruantes des autoproclamés leaders. Comme dans le sport de haut niveau et chez les militaires, tout est affaire de mental !

Au début du siècle dernier, les frères Caudron, fils d’agriculteurs de la baie de Somme, ont créé une entreprise de conception et de fabrication d’avions qui va donner le Rafale (V0). Lorsqu’ils se lancent dans l’aventure, ils n’ont jamais vu un avion voler ! Ils ont simplement vu des photos d’avion américain.

En revanche, ce ministre doit créer une confiance collaborative qui mobilise les énergies au niveau de la France et de l’Europe : un mental de vainqueur qui se bat sur les terrains auxquels il croit.

Par ailleurs, ce ministre a pour vocation de gérer l’activité régalienne la moins rentable à court terme. Il lui revient de repenser le système actuel afin de sortir de cette idée de rentabilité au profit de l’idée de l’infrastructure (voir « Imaginer de nouveaux outils de gouvernance » page 7).

Mais surtout, il doit, comme les Américains mettre en valeur les succès et les « équipes héros » qui y sont attachés.

 

Innovation de rupture

Comme indiqué au chapitre précédent, la notion d’innovation de rupture se détermine a posteriori. En revanche, la volonté d’atteindre des objectifs permet d’obtenir, à terme, une combinaison de faits et d’innovations qui créent une dynamique d’innovations.

Par exemple, on ne fait pas de l’intelligence artificielle en tant que tel. On peut vouloir développer l’économie circulaire avec des objectifs précis en matière de réduction de matière extractive, d’énergie, de chimie et de ressources humaines. Ceci conduit à innover de manière concomitante dans de nombreux domaines dont la collecte et le traitement de données stimulent la maîtrise de l’intelligence artificielle.

Le succès passe par une approche compréhensible par les parties prenantes des objectifs à atteindre, par des progrès mesurables et surtout par la mobilisation d’une chaîne d’expertise dynamique et organisée pour assurer son expansion.

 

Les défis sociétaux pour lesquels l’État devrait mettre en place des programmes de soutien à l’innovation.

L’état doit créer un cadre avec des objectifs compris et appréciés par le plus grand nombre. Ce cadre est ensuite « débité » en étapes. Il suffit alors de faire converger les ressources intellectuelles, industrielles et financières.

On ne préjuge pas au départ des innovations à oser, on les construit au fur et à mesure selon le processus inévitable de l’essai / erreur. La modularité est donc la parade contre la gabegie qui a marqué au siècle précédent les « grands projets », imaginés loin de la réalité et sous un angle fortement orienté « ingénieur ».

Un des défis, devenu nécessaire, est celui décrit plus haut (voir «Imaginer de nouveaux outils de gouvernance », page : 4) : la vie c’est l’échange. Une cellule qui n’échange plus meurt. La technologie des échanges de valeur[5] va devenir un axe de développement stratégique.

 

Financements destinés aux start-ups deep tech

La guerre des talents se fait à grands coups de publications, souvent destinées à intimider les éventuels concurrents. Ce ne sont pas nécessairement les milliards affichés qui doivent être considérés, mais l’ambition et la pertinence des objectifs du projet dans lequel ils prennent place.

La Chine est partie de rien il y a 50 ans et elle prétend dépasser les USA. À l’époque, elle n’étalait pas ses milliards. Nous savons plus ou moins où en sont nos challengers. Nous avons à nous positionner sur cet échiquier qui, contrairement à ce que certains affirment est particulièrement ouvert.

Pour ce qui nous concerne, la pertinence des projets sera déterminée par les créatifs sociaux qui prospèrent à travers la planète dans les générations montantes qui ne transigent pas avec leur objectif de donner du sens à leur vie.

Le financement devient presque une question secondaire. En période de guerre, les nations changent de mode de gestions. Ceci étant dit, le financement de prestations intellectuelles (donc immatérielles pour l’essentiel) peut donner lieu à innovations (que nous ne développons pas ici, voir néanmoins « Imaginer de nouveaux outils de gouvernance » page 4).

 

Place de l’innovation technologique dans le financement de l’innovation

Rare sont les innovations qui ne contiennent pas de la technologie. Toutes fois, le système doit permettre aux innovations non technologiques de s’exprimer.

 

La principale innovation que nous avons à faire concerne le pacte social du 21ème siècle (voir « Perspectives d’une nouvelle forme d’abondance » page 3). Sans ce pacte, nous ne permettons pas aux savoirs et aux talents de prospérer et donc nous ne serons pas en mesure de soutenir notre capacité d’innovation.

 

La création de richesse devient de plus en plus immatérielle, mais il ne faut pas tomber dans le piège d’une économie entièrement hors sol : les deux formes de création de richesse cohabitent depuis toujours, c’est simplement la proportion et la priorité qui change.

Avec sa tradition agricole et industrielle, la France est culturellement protégée contre ce risque. Toute la subtilité d’un ministre de l’industrie et de l’innovation (à réinventer) va consister à piloter harmonieusement l’économie matérielle et l’économie immatérielle. Ceci peut être facilité en jouant astucieusement, au sein de l’UE, entre les fablabs, les constructeurs, les éditeurs de logiciels, les gestionnaires de bases de données… etc.

 

Les principaux freins à la mise sur le marché de produits et services innovants

Qui se souvient de la première fois où il a eu envie d’utiliser Google comme moteur de recherche ? À l’heure actuelle, Google n’a quasiment jamais fait de publicité dans les grands médias et pourtant il a été très présent dans nos vies durant la décennie précédente.

Google s’est propagé en France à travers des réseaux d’influence, en amplifiant des techniques de soft power.

Plus que jamais, tout revient à une notion de stratégie par rapport à l’imaginaire des décideurs (chefs d’entreprise, fonctionnaires, grand public…). La communication qui permet de lier le « juste à temps » au besoin y complète le résultat.

Nous n’utilisons pas assez cette approche. Or, comme dans le même temps, nos POC sont réalisés, le plus souvent, hors de notre territoire, le temps que nous mettons à faire décoller « nos petits avions », nos innovations, déjà fragilisées par une absence de stratégie globale, sont rattrapés par les concurrents qui ont repris l’idée, l’ont améliorée et ont préparé son lancement.

 

Améliorer la mise sur le marché de produits et services innovants en France

Nous sommes dans une économie mature (de l’offre). Toute nouvelle offre doit s’inscrire dans un « mieux » perçu par l’acheteur. Sans pour autant parler de repli sur soi, les Français sont sensibles au thème de l’environnement et à l’amélioration des relations entre les personnes.

Si nos innovations entrent dans une vision partagée et qu’elles sont développées avec détermination (en gérant les sacrifices et les enthousiasmes), la mise sur le marché n’est plus un problème… Sauf au niveau des donneurs d’ordre qui ne joueraient pas le jeu. À cet égard, les décideurs devraient pouvoir afficher un indicateur de bonne conduite en la matière (voir à titre indicatif la comptabilité CAR ou la « comptabilité universelle »).

 

Liens d’innovation entre laboratoires de recherche, grandes entreprises, start-ups et PME

 

Associer les acteurs de l’innovation à la réflexion ou à la définition de certaines orientations partagées entre filières et acteurs publics de recherche.

Les alchimistes cherchaient à transformer certains matériaux en métaux et pierres précieux, ils n’y sont pas parvenus, mais ont jeté les bases de la chimie.

Nos concitoyens doivent pouvoir explorer une idée qui les taraude. Tout ce qui peut conduire à des découvertes constitue un bonus. Ces découvreurs, comme les innovateurs qualifiés de « concours l’Épine » doivent être mieux considérés. Leurs travaux, souvent orphelins, gagnent à être mis à contribution pour engager une réflexion sur des orientations stratégiques et inspirer le système.

Chaque individu est un mixte de « 9 cerveaux » fonctionnant avec plus ou moins d’intensité. Un modèle de société qui canalise ses formes de talents se prive de son plein potentiel.

 

Quoi qu’il en soit, comme évoqué plus haut, l’État doit choisir des orientations et définir une stratégie (apprenante si possible).

De par leur capacité à rassembler des citoyens avertis sur des sujets pointus et de par l’importance croissante de la sérendipité dans le domaine de l’innovation, les think tanks se mettent à jouer un rôle important dans les discussions qui doivent avoir lieu en amont des prises de décision et ensuite sur les déroulés des plans d’action. Cette forme de contribution apolitique vient compléter le panel traditionnel (chercheurs institutionnels, entreprises) en y introduisant des chercheurs indépendants.

Pour bénéficier de cet apport qui prend de l’importance, il est nécessaire de donner quelques moyens à ces think tanks, éventuellement en contrepartie de contributions effectives.

 

Faciliter les passerelles pour les chercheurs publics entre la recherche et le monde entrepreneurial

La décennie précédente nous a fait croire que les bons entrepreneurs étaient des jeunes étudiants à la tête « bien faite ». Statistiquement et sur le plan anthropologique, ce sont les personnes en étape 4 et 5 qui sont les mieux placées (voir page 3).

Les parcours de vie doivent être libérés et ils le sont de fait, puisque les générations montantes n’imaginent pas rester figées dans une entreprise, une administration ou un laboratoire durant toute sa carrière. Elles veulent diversifier leurs parcours pour accumuler de l’expérience et du savoir, ce qui est une bonne chose.

Il suffit donc de favoriser cette réalité et même la mettre en valeur. Pour cela, mixons les générations et les parcours. Cela passe une fois de plus par la reconfiguration du pacte social. Il ne faut pas que ce soit la protection sociale qui bloque, ni la peur de l’échec. À partir du moment où ces blocages sont levés, l’esprit d’initiative se libère. Il faut donc se mettre à le structurer pour l’inscrire dans un projet moyen terme évolutif dans lequel chacun perçoit la place qu’il veut et peut y prendre.

Ceci nous amène à aborder les travaux développés autour des monnaies complémentaires et d’une certaine idée du revenu de base que nous n’allons pas développer ici mais que nous pouvons développer à la demande (Forum Atena & Forum des Jetons).

 

Financements des dispositifs de recherche partenariale nécessaires pour développer l’innovation et l’emploi en France.

L’innovation, comme le partage du savoir, n’entre pas dans les tâches productives, mais dans les tâches contributives. Il est possible de lui attribuer une monnaie spécifique (comme cela s’ébauche de manière empirique à travers la logique des « tokens »). Ces jetons intelligents peuvent être considérés comme monétisables grâce aux gains de productivité obtenus à travers les nouveaux modes de production et de consommation.

Avec une telle approche, l’innovation n’est plus directement bridée par des capacités financières, mais par de la disponibilité des savoirs et des talents repérés.

 

Freins identifiés en matière de transfert technologique

Découvreur, inventeur, développeur, exploitant : autant de profils qui s’enchaînent dans l’épanouissement d’une innovation. Nous ne mettons en valeur que l’entrepreneur qui est censé réussir le parcours complet. À la fin, il remporte la mise aux dépens des profils qui ont eux aussi beaucoup donné au projet, soit directement, soit indirectement par leurs projets malheureux. Ceci qui devient de moins en moins réaliste tant le processus de réussite devient complexe.

Pour aller vers un modèle plus efficace, il convient de repenser la chaîne de récompenses.

Nous avons, dit-on, 9 formes de cerveau aux qualités complémentaires. Chaque être en est une combinaison particulière. Il n’y a pas de parcours idéal. Il y a seulement des contributeurs plus ou moins impliqués, créatifs et pugnaces. Si chacun a la garantie qu’il sera récompensé, il donnera le meilleur de lui-même. Il faut donc repenser le partage de la valeur.

Ce partage est complexe car il est évolutif. Des solutions à base de jetons intelligents commencent à être explorées… Le projet « débutance » avait été imaginé dans ce sens-là.

 

Les modèles qui permettent de renforcer le partenariat public-privé

Est-il nécessaire de renforcer les partenariats publics privés dans une logique qui ne serait plus teintée de libéralisme, mais marquée de nouveaux modes d’organisation de type « organique et fractal » ? Dans cette évolution, l’État devient un facilitateur et un garant de l’efficacité de la vie sociale, économique, culturelle, démocratique et vraisemblablement aussi spirituelle. Il confie des missions à des entreprises et veille à leur bonne exécution, au mieux des intérêts de la communauté, sous la surveillance d’instances locales démocratiquement élues. Cela doit se passer dans un climat ouvert et compétitif vis-à-vis du tissu entrepreneurial.

Le modèle PPP du siècle précédent n’a pas donné toutes les satisfactions attendues, mais surtout n’est plus applicable face à un tissu entrepreneurial en nid d’abeille.

Cette nouvelle approche met en évidence l’évolution fondamentale des fonctions des collectivités locales (et de niveau supérieur) qui deviennent des organisateurs avertis de la dynamique sociale et économique. L’économie circulaire commence par l’évolution de ces modes de gouvernance.

Exemple : la mise en production et production d’un nouveau produit passe par la description de son processus de distribution, de recyclage et donc des formations, des infrastructures …

 

Diffuser efficacement et durablement l’innovation dans le tissu économique

Dans un modèle de société tel que décrit ici, les expérimentations réussies se propagent naturellement et se perfectionnent de manière à ce que le tissu économique et social en profite.

 

Accès des acteurs français de l’innovation aux programmes européens

Simplifications nécessaires pour faciliter l’accès à ces dispositifs aux entreprises

Les entreprises sont souvent méfiantes à l’égard des relais tels que MESRI/réseau des Points de contact nationaux, pôles de compétitivité, Bpifrance, ADEME, ANR, ANRT, FIT, CURIF, CPU, CDEFI, CGE… Elles sont perçues par elles comme des pôles d’influence et d’incompréhension (déconnecté de la vie réelle, représentées par des personnalités qui se sentent à l’abri des aléas auxquels sont exposés les acteurs de l’économie réelle … etc. Perçus comme des distributeurs de bonnes grâces, informations, contacts, subventions et autres bienfaits, ils sont respectés, mais pas ou peu considérés par leurs paires.

Ces relais devraient être plus ouverts grâce à un brassage des collaborateurs en termes de cursus, d’âge, et de formation. Ces relais doivent devenir des lieux de rencontre interactifs, ou il est possible d’échanger en amont de la construction de stratégies industrielle et durant son déroulement. Ils doivent être aussi plus « animateurs accompagnants », à l’affût des idées et des talents, de manière à stimuler les entreprises.

Les entreprises n’ont pas toujours la possibilité de se faire une idée par elles-mêmes sur ce qu’il se passe au niveau Européen et dans le reste du monde. Le quai d’Orsay pourrait être présent dans ces instances. En revanche, les entreprises sont toujours intéressées à en apprendre davantage et imaginer la manière d’y entrer en synergie.

 

Mettre en place une articulation efficace entre les programmes nationaux et les programmes-cadres européens

Ce sont précisément les organismes cités ci-dessus qui doivent jouer le rôle de relais en amont et en aval. Cependant, cela ne peut pas être fait par des jeunes diplômés n’ayant pas été actifs dans les différents points de la chaîne économique (Etat, entreprise, relais…). Le bon sens ne suffit pas pour stimuler l’intuition ! Il faut des personnes d’expérience et de réseau pour le faire.

 

Lisibilité des actions de soutien à l’innovation

Les actions menées durant la décennie précédente ont contribué à dépoussiérer l’idée qu’il est possible d’innover en France en dehors de quelques laboratoires privilégiés. Néanmoins le massage demeure confus.

Il y a l’innovation subventionnée qui permet aux grandes entreprises de maintenir ou dépasser leurs positions à l’international et il y a l’innovation de nos chères startups. Les « grands-messes », comme Vivatech, avec sa sympathique image de kermesse, stimulent les rencontres et inspirent la galaxie des startups… Mais, de retour à la maison il ne reste plus guère qu’Internet pour passer à l’acte.

Les incubateurs sont insuffisamment outillés pour accueillir, informer, évaluer et mettre en relation. Ils ne disposent pas eux-mêmes d’orientations stratégiques en provenance des collectivités locales ni du ministère de l’industrie et de l’innovation (qui n’existe pas). Ces incubateurs ont pourtant un rôle bien plus important qu’il n’y paraît. Ce sont eux qui ont en main la dynamisation ou la banalisation de l’innovation.

L’État doit se rendre efficace dans sa gestion et dans ses relations avec les citoyens afin de libérer massivement des ressources humaines capables de remplir cette mission qui devient stratégique. Il doit sélectionner, former, informer, équiper, écouter et encourager ces incubateurs.

Ces fonctions d’incubateurs doivent être confiées à des femmes et des hommes d’expérience, ayant eux-mêmes innové et créé des entreprises. Ils doivent travailler en équipe tant le nombre de qualités et d’expériences requises est diversifié.

 

Dispositifs d’aides à l’innovation sont-ils suffisamment connus

Renforcer leur visibilité, leur compréhension par les acteurs de terrain

Les aides à valeur « électorales »

Elles sont mal connues parce que trop complexes. Des tentatives de système expert ont été faites pour permettre aux intéressés de comprendre les aides possibles les concernant et éventuellement les aides souhaitables stratégiquement. Il faudrait aller plus loin, mais surtout se poser la question de la nature de ces aides et ma manière de les accorder et veiller à en optimiser l’usage.

 

Pour concevoir une nouvelle entreprise il y a 10 ans, il fallait environ 6 hommes mois. Au fil du temps cette durée n’a cessé de s’allonger et de se complexifier. Pour monter un projet crédible, il faut monter une équipe pluridisciplinaire : les entrepreneurs solitaires sont peu écoutés. La constitution d’une équipe est un vrai casse-tête auquel les incubateurs prennent rarement part.

La première des aides à la création d’entreprise (dont les innovantes) est le chômage. Or, les chômeurs sont isolés.

Pour ce qui est des aides pécuniaires, le système est assez déceptif. Les entreprises établies s’en méfient (chronophages et piégeuses). Les créateurs d’entreprise non assistés s’en détournent (trop faibles).

 

Les aides non financières

Les aides ne sont pas seulement financières ou du moins peuvent ne pas l’être en mettant en place des réseaux efficaces de partage de savoirs et de mise en relation ainsi que des lieux de rencontre et des outils de partage.

Récompenser les personnes en phase 4 et 5 de leurs parcours de vie qui donnent du temps, du savoir et de la créativité à des personnes en phase 3 et 4 constitue une double rationalité : continuité de transmission et prolongation de la vie sociale et économique.

Toutes fois, ceci nécessite de la préparation pour que chacun joue le rôle qu’il a compris et qu’il est fier de remplir.

 

Vers les plateformes socialisées de collaboration

Le système de débutance avait été imaginé pour apporter une solution collaborative à ce sujet. Pourquoi ne pas la revisiter ? Ils informent et ils financent en même temps. Il est prolongé par le projet de plateforme plateformes du type ValYooTrust (http://51.68.84.55) et plateformes en communs https://plateformes.coopdescommuns.org/.

Il s’agit notamment de remettre en cause le rôle des plateformes de makers pour leur donner une dimension sociale plus consistante. AÀ partir de ce moment  où la maturité sociale de ces plateformes sera atteinte, elles pourront être mises à profit pour gérer la création de valeur lors de la création d’entreprises innovantes.

 

Améliorer la lisibilité des marques et labels portés par l’État

Cette lisibilité s’imposera d’elle-même dès lors que l’utilité et l’ouverture seront avérées. Nous sommes dans une période où l’idéologie partiale et les intérêts personnels ne doivent pas être le moteur de la construction d’un projet. Nous avons tous plus ou moins des convictions, nous avons surtout des solutions à imaginer face aux mutations qui viennent à nous et que nous devons aborder avec efficacité.

L’État doit être le facilitateur des Femmes et des Hommes de bonne volonté. Ces marques et ces labels doivent refléter cet état d’esprit.

 

Dématérialisation des procédures d’octroi des aides à l’innovation

On peut toujours faire mieux en matière de dématérialisation de la partie administrative. Mais il faut surtout faire plus sur le plan relationnel.

Un des facteurs de succès de la banque de Muhammad Yunus provient du fait que les emprunteurs rendaient régulièrement des comptes au représentant de la banque. Ils examinaient ensemble les points noirs et les points lumineux.

Ceci nous conforte dans l’idée que l’État, en matière de ressources humaines doit se reconfigurer en osant se rendre le plus efficace possible, grâce aux innovations liées au numérique, et accueillir dans ses rangs (en collaboration avec les collectivités locales) les femmes et des hommes d’expérience capables de piloter ce tissu d’innovateurs.

 

Volets dédiés à Industrie, l’énergie et l’agroalimentaire

Ce sujet étant moins directement lié aux expertises des think tanks du numérique, nous nous limitons à souligner le fait que parmi les grands chantiers, il y a la recomposition du tissu industriel détruit par la « mondialisation » et quelques autres LBO… Ce triste épisode de notre histoire, néanmoins nécessaire, nous donne la possibilité de reconstruire une industrie radicalement différente, orientée vers l’économie circulaire.

Le numérique va jouer une position centrale (données, pilotage de process, logistique…).

Ceci nous renvoie aux considérations développées au début (voir « Adapter les forces vives aux besoins de l’économie numérique » 5), décrit pour l’industrie du numérique, mais qui s’applique à bien d’autres secteurs, pour ne pas dire à tous.

 

 

[1] Dédiées aux résolutions de crises de toute nature (santé, justice, environnement … ), selon le processus : prédiction, prévention en en dernier recours curation.

[2] Développement du bien commun : famille, culture, savoirs, innovation, démocratie, spiritualité.

[3] Les SSII sont conçues pour réaliser des « grands projets » comme il s’en fait de moins en moins au profit d’approches moins spectaculaires, mais plus réalistes basées sur l’expérimentation progressive.

[4] Remarque valable pour tous les indépendants.

[5] Que l’on appelle actuellement « jeton » et dont la monnaie fait partie (historiquement des jetons frappés au pied du temple Monna à Rome).