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Institutions du passé face au futur

L’Europe a été le leader mondial durant les 3 derniers siècles en matière d’innovations technologiques mais aussi sociaux et sociétaux. Les États unis ont pris le relais en créant une civilisation dite « occidentale » basée sur la compétitivité et la profitabilité.

À présent, le progrès technologique nous conduit à franchir de nouveaux progrès sociétaux. Ces progrès semblent trop radicaux pour que nos institutions s’y adaptent. Exemple : la France discute « retraites » avec les acteurs du passé sans vision du futur. Résultats : blocages et pinaillages. Il y a danger de désuétude. Mais nous pouvons réagir.

 

Le travail au 21ème siècle

En gros, le travail consiste à transformer la matière pour pouvoir l’échanger contre de la monnaie. Avec cette monnaie, il est possible de se procurer tout ce dont en a besoin et s’il reste de la monnaie, il est possible de céder à certaines envies.

L’Homme a d’abord transformé de la matière, mais il a aussi créé des tâches qui transforment de la donnée. Il s’est peu à peu outillé pour automatiser le traitement de la donnée puis le traitement de la matière.

Ainsi, la notion de travail se transforme.

Le monde du travail s’est structuré au fil du temps autour de la notion de métiers qui recouvre deux notions : la spécialisation et la hiérarchie au sein de cette spécialisation.

Or, la notion de métier se délite : les robots sont programmables à volonté. Ils n’ont pas de métier. Ils ont juste des automatismes.

La notion de métier cède le pas à la notion d’expertise, celle qui permet de faire évoluer les robots et de collaborer avec eux : la machine prend en charge les tâches hypercomplexes et celles qui sont répétitives. L’homme se réserve les tâches créatives et décisionnelles.

Contrairement à la notion de métier, l’expertise n’est pas assortie de la notion de prestige : elle est ne confère pas de pouvoirs en elle-même. C’est en collaborant que l’expertise prend sa valeur. Cependant, elle est une notion trop pointue pour que les individus y consacrent l’intégralité de leurs parcours professionnels. Ils ressentent le besoin d’évoluer. L’apprentissage permanent devient une notion de survie.

 

Le contresens occidental

Il n’en reste pas moins vrai que travail est indispensable aux Hommes tant dans sa valeur sociale qu’économique.

Le travail, depuis la sédentarisation a consisté à satisfaire des besoins primaires du plus grand nombre. L’occident, plus particulièrement les Anglo-Saxons, a prôné le modèle libéral qui est conçu pour encourager le plus grand nombre à prendre des initiatives. Produire toujours plus pour dégager toujours plus de profits.

Ainsi, le modèle libéral se targue d’être LE modèle qui a sorti le plus grand nombre de la pauvreté. Cette élogieuse certitude n’est pas exacte : c’est le progrès qui a permis ce résultat. D’autres modèles de société auraient pu y parvenir. La Chine n’est pas ouvertement libérale et elle sort jour après jour sa population de la pauvreté.

 

Raisonner « parcours de vie »

Ainsi, pour aborder le sujet de la retraite, il devient nécessaire d’élargir la notion de travail et de retraite. Il faut raisonner « parcours de vie ».

À présent, nous sommes arrivés à une maturité des savoirs faire en matière de besoins primaires. Nous voulons consommer moins mais mieux et produire de manière plus responsable.

Cela nécessite de plus en plus de savoirs et de talents, c’est-à-dire du bien commun.

La vie est une chaîne continue d’erreurs et de progrès avec des temps forts et des périodes régimes de croisière. La vie humaine est calée sur ce modèle.

L’enfant qui naît a besoin de la tendresse de ses parents pour prendre confiance et s’approprier l’espace, il a besoin de ses grands-parents pour révéler ses antécédents. Plus avancé en âge, il a besoin d’apprendre à apprendre puis il désire « faire ». Mais au bout d’un moment, il a envie d’innover puis de transmettre et enfin de fabriquer de la paix, celle dont le petit enfant qui arrive à besoin à son tour.

Cette notion de parcours de vie a été cassée par l’ère industrielle. L’ère industrielle constitue le dernier chapitre de la sédentarisation. La sédentarisation, c’est l’Homme qui se met en lutte contre la nature pour qu’elle lui fournisse ce dont il a besoin. Mais celle-ci n’est pas obéissante. L’Homme a peur de manquer. Il compense par du travail. Il devient obsédé par le travail : tout le monde doit contribuer à la production et à la protection du bien privé qui permet de produire. Le modèle libéral, basé sur l’égoïsme et la notion de hiérarchie, a intensifié cette certitude.

La notion de hiérarchie se délite à son tour car elle ne correspond plus à l’époque que nous abordons : dans un monde numérisé, il est demandé à l’Homme d’être de plus en plus créatif et réactif. La hiérarchie éloigne la décision de l’action, ce qui est mauvais pour la réactivité et écrase les talents, ce qui est mauvais pour la créativité.

Mais surtout, l’égoïsme constitue le bug du libéralisme : l’Homme est fondamentalement un être social parce que seul il ne peut quasiment pas survivre. Il est obligé de coopérer.

 

Utile tout au long de la vie

Les besoins primaires tendent à être de mieux en mieux satisfaits par les robots. Les générations montantes souhaitent donner du sens à leur vie en développant le bien commun. Le modèle de société que nous avons à imaginer consiste à réorienter la capacité d’initiative vers le développement du bien commun.

Certaines périodes de la vie y sont plus favorables, en particulier après avoir donné du temps à élever ses enfants et exploité ses savoirs et ses talents.

Ainsi la notion de retraite doit évoluer vers une notion de temps dédié au bien commun. Les modalités de contribution sont infinies : famille, partage de savoirs, innovation, démocratie, résolutions de conflits, spiritualité… Reste à inventer le mécanisme de récompense.

C’est cette étape qui est à aborder. Cela ne peut pas se faire en discutant entre énarques et syndicalistes. Ils se sont vus 22 fois pour aboutir à un no-deal : normal !

Un problème mal posé n’a pas de raison d’aboutir à une solution consensuelle.

Répondons à la question : comment évoluer vers un modèle de société qui privilégie la contribution tout au long de la vie, pas seulement dans l’économie productive, mais aussi dans l’économie contributive et empathique. Comment synchroniser ces trois formes de création de richesse.

En attendant, réglons les exagérations du système de retraite et reprenons une vie normale !

 

PS important : Les interlocuteurs traditionnels pour ces questions sont les membres du gouvernement et les partenaires sociaux, dont les syndicats. les syndicats sont nés dans le conflit du 19ème sicèle travailleurs / patrons : un sujet qui n'est plus d'actualité mais qui demeure en équilibre précaire.

La question mérite d'être traitée sur un tout autre plan : souveraineté sociale et économique, car il s'agit de "gros sous" et donc de haute finance. Pourquoi ne pas rafraichir la réflexion en s'appuyant sur les think tanks.