« Economie productive – Economie contributive »
Par genevieve-b. jeudi 27 janvier 2022, 16:08. à débattre Monnaies complémentaires pacte social revenu universel intelligent économie économie contributive économie productive | Lien permanent.
Aux éditions ISTE
Dans mon précédent livre, « Changeons de civilisation » je m’interrogeais sur l’avenir que la civilisation occidentale qui a servi de modèle de référence durant ces derniers siècles au développement de l’humanité.
En l’écrivant, j’avais acquis la conviction que nous vivons bien plus qu’un changement de civilisation.
Dans ce livre, « économie productive – économie contributive » (ed. ISTE), je pars d’une hypothèse : « sommes-nous en train de sortir de la sédentarisation, dont le dernier chapitre a été l’ère industrielle ? ».
La sédentarisation
Les motifs qui ont poussé l’Homme à se sédentariser ne sont pas connus avec certitude. Mais deux constats nous éclairent : cette mutation se serait amorcée à la fin d’une période turbulente sur le plan climatique et géologique. Ces turbulences ont conduit les Hommes à observer leur environnement et à implorer les faveurs de la nature.
C’est ainsi que la spiritualité a pris une place prépondérante dans l’organisation des tribus au point qu’elles se sont mises à réaliser des monuments dédiés aux cérémonies religieuses. L’ambition croissante en matière d’architecture a rendu nécessaire des installations durablement autour des chantiers. L’adoucissement du climat a rendu cela possible.
La sédentarisation nécessite d’entrer en lutte contre la nature afin qu’elle fournisse à l’Homme ce dont il a besoin. Comme elle n’en fait à sa guise, l’Homme a pris l’habitude de produire plus que le nécessaire. Les surplus ont permis de faire des échanges avec les voisins. L’économie de marché s’est développée, la monnaie, la propriété et la rente aussi.
Le passage de l’économie agraire à l’immatériel
La monnaie a permis de structurer les activités humaines. Mais la juste répartition de la richesse au regard du mérite de chacun demeure un problème non résolu.
Conçue dans l’économie agraire et artisanale la notion de monnaie a ensuite été assez peu adaptée pour favoriser le développement de l’industrie, bien que les mécanismes de création de valeur soient très différents. Arrivée à l’économie de l’immatériel, sa gouvernance devient délirante en termes de complexité et d’efficacité.
Les crises s’enchaînes plus vite encore que les virus et que les catastrophes climatiques.
Nouvelles priorités, nouvelle gouvernance
A présent, les générations montantes, en majorité, ont grandi dans un contexte où leurs besoins primaires ont été globalement satisfaits. Pour les jeunes Européens, le consumérisme et les luttes de classes appartiennent à un passé qu’ils veulent dépasser. Ils veulent « réussir leur vie » en lui donnant du sens.
Dans le même temps, les turbulences environnementales réapparaissent, toujours aussi inquiétantes pour l’Homme. Grâce à notre efficacité croissante à satisfaire les besoins primaires du plus grand nombre nous aspirons à satisfaire des besoins d’un niveau supérieur. Ces besoins passent par le développement du bien commun.
Justement, les générations montantes souhaitent développer le bien commun. Et justement aussi, en développant le bien commun, nous produisons un contexte civilisationnel favorable à l’éclosion des talents et à l’enrichissement des savoirs.
Or, la compétitivité des zones géopolitiques va se jouer sur leurs capacités d’attractivité des talents et des savoirs. Pour y parvenir, il faut complexifier notre vision de l’économie en distinguant l’économie productive (dédiée aux besoins primaires de personnes) et l’économie contributive (dédiée au bien commun).
Ainsi, la priorité n’est plus de construire des géants industriels et financiers capables d’aller à la conquête du monde. Elle se recentre sur la capacité à se doter d’un tissu entrepreneurial créatif et réactif, capable de résister aux aléas et aux attaques tout en étant évolutif et néanmoins sécure.
D’une gouvernance guerrière et marchande, nous passons à une gouvernance symbiotique. C’est cette mutation qui s’opère. Les zones géopolitiques qui vont faire évoluer leurs institutions en conséquence pourront espérer éviter les phases de chaos qui caractérisent les grandes mutations sociétales.
Le pilotage de l’économie pose des problèmes d’une complexité nouvelle qui vont nécessiter de nouvelles institutions et de nouveaux outils de gouvernance.
Nouvelles gouvernances, nouveaux outils
Ce n’est le numérique qui change nos vies, c’est parce que nous poursuivons notre évolution que nous développons le numérique.
Si la monnaie a joué un rôle fondamental dans le développement de la sédentarisation, la donnée va jouer un rôle tout aussi fondamental dans le développement de cette ère symbiotique.
La période industrielle est née en Europe et elle a besoin de se réinventer. La période que nous terminons se caractérise par la perte d’efficacité de nos institutions et de leurs outils de gouvernance. La monnaie, la justice ou encore la démocratie sont confrontées à la défiance des citoyens et la spiritualité, qui est pourtant le point de départ de la sédentarisation, ne remplit plus ses fonctions de cohésion et d’élévation de l’Homme.
Le numérique donne accès aux données et aux outils qui permettent de bâtir un monde qui où chacun à la possibilité et même le devoir de contribuer à la vie des Hommes au sein de Gaïa, et ce tout au long de sa vie.
Deux instruments sont à explorer plus sérieusement pour rendre cela possible : les monnaies intelligentes qui permettent de développer un revenu universel lui-même intelligent.
L’économie devient duale
La création de valeur dans l’économie productive se déprécie à l’usage ou avec le temps : les carottes que je viens d’acheter vont être détruites si je les mange et elles vont se défraîchir si je les mets de côté. Notre monnaie a été conçue pour cette économie.
La création de valeur dans l’économie contributive, celle qui concerne la famille, les connaissances et l’innovation, la démocratie, la spiritualité et les activités empathiques dédiées aux résolutions de conflits, se bonifie à l’usage et avec le temps.
De plus, si au fil du temps, toutes les activités productives ont finalement trouvé une métrique (durée, longueur, prix… etc.), les activités productives n’ont pas de métrique.
Pourtant, pour aborder la complexité du 21ème siècle, il devient nécessaire de mettre en dynamique ces deux composantes de la vie sociale et économique. Ceci est possible via la biodiversité monétaire car les monnaies intelligentes permettent de tourner le dos à une fiscalité et aux mécanismes de redistribution d’une complexité inhumaine.
Plus urgent encore que le climat
Pour l'heure, la finance mondiale s’est approprié la gouvernance du monde. Elle défend une certaine idée du libéralisme et une gouvernance basée sur le profit. Elle a conscience que cette gouvernance n’est plus tenable. Elle focalise l’attention sur des correctifs environnementaux afin de donner de nouveaux débouchés à l’industrie qui se met à renouveler le parc automobile, les équipements de chauffage, les générateurs d’électricité… etc.
Certes le climat devient menaçant. Mais la recherche du profit pousse à la robotisation et le numérique pousse vers un monde déshumanisé. La classe moyenne s’en trouve fortement menacée. Elle montre des signes graves d’effondrement. Or durant la sédentarisation, la stabilité de la classe moyenne a été le facteur de longévité des civilisations.
Il y a donc urgence à repenser notre pacte social en mettant les atouts du numérique au service des mécanismes de la vie !
Ce livre compile les travaux développés dans différents think tanks franciliens depuis les années 2000 à aujourd’hui, dont Les Nains de Jardin, la commission Développement durable du conseil de l’ordre des experts-comptables, FAIR, la Société Française de Prospective, le MFRB, Innocherche, Forum Atena, Orée, La Fabrique du Futur… ect.
Commencé au Cameroun au printemps 2018, ce livre a été achevé au printemps 2021, autrement dit dans des lieux et une époque de grande effervescence intellectuelle.
La 1ère partie, examine les différents signes qui confortent l’idée que nous terminons la période de sédentarisation.
Ainsi, ce que nous appelons « l’économie » devient plus précisément « l’économie productive[1] ». Une autre forme d’économie s’impose : « l’économie contributive[2] ».
Ces deux économies ont des caractéristiques radicalement différentes et pourtant elles sont intimement complémentaires. Nos modes de gouvernance et nos outils doivent donc être complexifiés.
La seconde partie met en relief :
· L’urgence : refonte du pacte social. Point de révolution verte sans traitement du modèle sociétal actuel qui laisse s’effondrer la classe moyenne plus vite que ne se « dérègle » le climat !
· Les pistes d’expérimentations : monnaies intelligentes, revenu de base lui-même intelligent, démocratie organique ou encore numérique 1.0 (successeur du 0.0 actuel).
Les zones géopolitiques qui vont parvenir à mettre en synergie l’économie productive et l’économie contributive seront en pole position connaître une renaissance prometteuse.
Le numérique actuel (0.0) doit être relayé par un numérique 1.0 : modulaire et au service du bien commun avant d’être au service de l’économie marchande.
L’Europe est en pole position pour en jeter les bases.