La France : quelles ambitions ?
Par genevieve-b. mercredi 26 juin 2024, 16:30. à débattre démicratie géopolitique économie | Lien permanent.
La crise politique actuelle est certes multifactorielle, mais elle prend sa source dans l’absence de perspectives dans la tête du président de la République, des élus et finalement des citoyens.
La force des ambitions
Le désir de progrès est source de vie. Sans perspective, chacun ère comme une poussière dans le vent. Sauve qui peut !
Les grandes familles considèrent qu’il y a 3 sortes de générations : celle qui crée, celle qui croit et celle qui croque.
Celle qui croque est encombrée par l’héritage glorieux de ses aînés. Elle n’assume pas la nécessité d’actualiser les richesses dont elle a hérité et qui immanquablement se déprécie avec le temps.
C’est typiquement ce que nous avons pu ressentir durant cette campagne législative. Pas un parti ne nous a parlé de géopolitique, de souveraineté numérique, de système monétaire, de rénovation du pacte social, d’amélioration du fonctionnement de l’Union Européenne, de protection de notre patrimoine culturel et humain… etc.
Les « grands Hommes » ont réussi à faire grandir la France en proposant à nos concitoyens des perspectives inspirées de leurs intuitions face à un monde en mouvement.
Ils ont proposé un futur désirable vers lequel ils pensaient nécessaire de nous conduire.
Une fois ce futur désirable adopté, les énergies convergent vers l’atteinte du but : c’est la force de l’intelligence collective.
Même si le but n’est pas totalement atteint, avec lui, des étapes ont été franchies et de l’expérience a été acquise.
C’est bien de cela dont nous avons besoin actuellement. A défaut, nous avons entendu des chamailleries sur des sujets certes importants, mais pas porteurs.
Pire, aux extrêmes, nous avons entendu la promesse d’un repli sur soi, donc de la fragilisation. C’est ainsi que les « petits Hommes » font de dégâts. Et ces dégâts sont terriblement difficiles à réparer.
Faute d’ambition, le débat reste collé sur le quotidien
Les gilets jaunes ont posé clairement la question de la « fin du mois ». Les partis s’efforcent de répondre aux réels problèmes de la fin du mois, mais les électeurs demeurent sceptiques.
Ils comprennent que les réponses sont fabriquées avec de l’endettement. Or, l’endettement et leurs conséquences, ils connaissent !
Manifestement, les principes de gouvernance qui ont fait notre force deviennent toxiques. Nos sources de richesses se dérobent et nul n’indique comment est-ce que nous allons recréer de la prospérité.
Résoudre les problèmes de fin du mois passe par une proposition en matière de modèle de société : quel pacte social dans ce monde qui ne ressemble déjà plus à celui dans lequel les électeurs sont nés.
Comment en est-on arrivé là ?
À force de ne faire que ce que les autres ont décidé pour la France, nous avons à présent une classe politique qui écoute des experts normatifs et non prospectifs. C’est ce qu’il s’est passé en 2020 avec les 26 économistes, dont Daniel Cohen, Laurence Boone, Jean Pisani-Ferry, Philippe Aghion, qui ont planché en 2020 sous la houlette de Jean Tirole et Olivier Blanchard. Ils ont finalement rendu une copie blanche ! Cette alerte a été étouffée. Aucun économiste alternatif n’a été écouté !
En 2020, la notation de la France était déjà un problème. Les bonnes questions ne consistaient pas à voir comment continuer à faire fonctionner l’économie avec des dogmes, qui ont certes fait merveille durant le 20ème siècle. La question était déjà : pourquoi les choses vont de plus en plus mal ?
« C’est la faute au climat » ont dit les uns, « la faute à la Chine » (et ses alliés) ont dit les autres…
En 2020, tous les ingrédients d’un effondrement potentiel de la civilisation occidentale étaient visibles, mais personne ne voulait les voir, à commencer par la haute finance (les « obscures » selon Jacques Attali).
Au lendemain de la dernière guerre mondiale, la France s’était dotée d’un commissariat au plan qui avait :
- des futurologues dont la mission était d’élaborer une vision à long terme (30, 60, 90 et 120 ans).
- des prospectivistes dont la mission consistait à ajuster cette vision à moyen terme afin de permettre aux institutions et aux entrepreneurs de faire leurs propres plans.
- Des prévisionnistes qui permettaient à tous de surveiller le déroulement de ces plans et leur réajustement.
Sous la pression des USA, nous avons supprimé le commissariat au plan. En revanche, les USA et la Chine ont conservé leur commissariat. Nos institutions se sont cadrées sur les directives de l’OCDE et nos entreprises sur celles prodiguées par les grands cabinets américains.
À présent, nous devons reconstruire notre savoir-faire en matière de construction de plans à long, moyen et court terme. Il ne s’agit pas de définir combien nous allons avoir besoin de brosses à dents dans 3 ans. Il s’agit de comprendre le sens de l’évolution de notre modèle de société, de celui des autres, de notre environnement, de nos relations avec les autres zones géopolitiques, de l’impact de nos progrès et de ceux des autres… etc.
Notre avenir entre nos mains
Il faut des crises pour déconstruire. Nous en tenons une belle ! Mobilisons-nous pour éliminer les imposteurs qui ont déjà envoyé à Matignon les directives pour régler leur fauteuil et l’approvisionnement des capsules de la cafetière…
Les Français se sentent en danger. Ils sont prêts à se mobiliser pour un grand renouveau qui promet de la prospérité grâce à une compréhension approfondie de la mutation sociétale en cours.
Les élus finalement choisis par les citoyens doivent se mettre en état d’écouter les futurologues. C’est par eux que commence le travail de construction d’une ambition crédible.
Ce dimanche, choisissons les candidats qui ont l’ouverture d’esprit qui nous permet de construire une ambition pour la France !