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Employeur – employés : la liberté à tout prix

Cependant, le marché du travail qui émerge ne repose plus sur le même modèle.

Une autre modification s’opère tant sous l’impulsion des employeurs que des travailleurs :

  • Les générations montantes ne croient plus à l’emploi à vie. D’ailleurs, elles ne le recherchent plus, de peur de se sentir spoliées dans leur capacité à enrichir sans cesse leur palette d’expériences et de savoirs ainsi que leur capacité d’initiatives.
  • De leur côté, les employeurs redoutent d’aliéner leur flexibilité en nouant des contrats rigidifiés par le Code du travail. Par ailleurs, elles savent que leur capacité à se renouveler passe par le brassage permanent de talents engagés sur des projets qui se veulent passionnants.

 

À la base de cette évolution, il y a la mutation de la notion de savoir : qui le détient, qui le transmet, qui fait l’effort de l’acquérir, comment évolue-t-il ?…

Au début de l’ère industrielle, c’était le patron qui apprenait à ses employés le maniement des machines et les procédures à respecter. Les employés se dévouaient à leur patron et attendaient en retour une stabilité sociale et financière suffisante pour avoir des projets familiaux et quelques loisirs.

Les générations montantes arrivent dans l’entreprise avec une base de connaissance et surtout une réelle capacité à apprendre. Apprendre et enrichir son expérience fait même partie de leurs exigences. En effet, elles ne se définissent plus par leurs diplômes de départ, mais à travers ce qu’elles ont fait et leurs centres d’intérêt.

Dans un tel contexte, les employeurs ne se sentent plus tenus de former leurs employés. Ils veulent trouver les bons talents au moment où ils en ont besoin et pour la durée qu’ils estiment nécessaire.

Ainsi, pour donner la priorité à la créativité et à la réactivité, le monde du travail évolue spontanément vers une reconfiguration simplexe de ses règles de fonctionnement.

  • La formation devient multiforme et de plus en plus informelle. Elle fait partie du patrimoine de chacun, qui se doit le le faire fructifier.
  • La contractualisation le devient aussi multiforme et parfois même informel comme on le voit par exemple avec la notion de propriété intellectuelle.

 

Puisque le diplôme compte peu à peu moins que la qualité du parcours, les contrats se doivent d’être gagnant gagnants et non plus inscrits dans la durée sur une base fixée au départ.

C’est ainsi que les approches lourdes sont abandonnées.

 

Des désirs contraires aux intérêts des partenaires sociaux

Cependant, même si tout le monde s’accorde à dire qu’il faut libérer les capacités d’initiative de chacun, nos institutions ne sont pas pensées pour servir ce nouveau fonctionnement du marché du travail.

Elles s’y opposent car elles sont conçues pour pérenniser le système qui a fait merveille durant l’ère industrielle.

Conséquence :

  • D’une part, les jeunes ne peuvent pas construire des projets de vie de famille car l’enchaînement de petits boulots sans garantie minimum continue, ne le permet pas.
  • D’autre part, les entreprises ne peuvent pas fixer leurs savoir-faire, étant sans cesse en train de réinventer une partie de leur patrimoine d’expérience, alors même que les seniors vivent mal le fait de voir leur capital de savoir fondre comme neige au soleil.

 

Cette problématique est nouvelle, du moins à cette échelle. Certes, désormais, les individus souhaitent être responsables de leur trajectoire et les entreprises de leur stratégie patrimoniale. Cependant, ces électrons libres ont besoin d’être organisés de manière démocratique, c’est-à-dire au mieux des intérêts de la collectivité.

  • La collectivité doit veiller à ce que chacun puisse développer ses talents et ses savoirs.
  • Elle doit également structurer le tissu entrepreneurial de manière à favoriser l’enracinement du potentiel d’innovation et le patrimoine collectif des savoirs.

Le rôle de la collectivité devient donc fondamental.

La pluridisciplinarité s’impose dans tous les domaines. C’est ainsi que la coopération remplace la subordination. Les travailleurs deviennent les véritables acteurs de l’économie, certains en tant qu’entrepreneurs, d’autres en tant que pollinisateur de savoir-faire, d’autre encore en tant que facilitateurs… etc.

 

Le mode de fonctionnement de notre tissu syndical, de nos codes du travail, de notre modèle éducatif et surtout de notre protection sociale sont sérieusement et durablement bousculés.

De nombreuses manifestations ont lieu actuellement pour réfléchir collectivement à cette problématique. Elles vont permettre, je l’espère, de faire prendre conscience de ce changement de réalité sans retour.

 

La solution ne viendra pas d’en haut

La recherche de solution devient une priorité. Certes, rien n’est possible tant que les acteurs actuels et ceux qui aspirent au changement n’ont pas mis leur vision en concordance. Il ne s’agit pas de débattre d’une option doctrinale, mais de prendre en compte la réalité puis d’exposer les nouveaux besoins.

Opportunément, dans le sillage des lanceurs d’alerte, des intuitions se font jour. Les plus classiques s’intéressent à faire évoluer la fiscalité, mais nous savons que cette voie a définitivement montré ses limites de complexité et d’injustices chroniques.

Il faut donc se tourner vers des solutions empreintes elles-mêmes de simplexité.

Le revenu de base, indexé pour une part sur la création de richesse productive (qui satisfait aux besoins de la vie quotidienne), valorisé en monnaie nationale, mais aussi, pour une autre part, sur la création de richesse contributive (qui satisfait aux besoins du terreau social et culturel), valorisé en monnaie locale semble s’imposer comme une piste à explorer sérieusement.

Le revenu de base est l’instrument de la mobilité dont les protagonistes du marché de l’emploi ont besoin. Il est simple et efficace. Il repose sur la confiance et le bon sens.

Les expériences faites autour du revenu de base montrent toutes que l’homme s’en sert pour construire ce qui lui permet de progresser. Ceci fait écho au fonctionnement naturel chez un individu qui a, au final 3 priorités : produire pour assurer sa subsistance, développer une vie sociale pour favoriser la reproduction de l’espèce dans de bonnes conditions et s’élever en élargissant ses connaissances. L’homme normal a donc bien d’autres choses à faire que combler son oisiveté ! Il veut pouvoir le faire dans un système collectif simple, équitable, efficace et de ce fait attractif.

Le système actuel est basé sur le sauve-qui peut. Il fait le lit de l’apathie des uns et la violence des autres … plantant le décor des pires heures de l’humanité dont nos ainés ont tous dit : « plus jamais ça ».

Petit détail de l’histoire : c’est à partir du néolithique qu’apparaissent des ossements qui montrent que les hommes se faisaient des violences entre eux, pouvant même entrainer la mort. Le néolithique, c’est l’apparition de la sédentarisation et donc de la priorité privée.