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De la défiance à la confiance

L’Amérique actuelle a été construite, à partir de presque rien, par des hommes et des femmes qui ont pris des risques et qui se sont fait confiance.

La finance y a joué un rôle essentiel. Les banques américaines portent le message suivant : « si vous avez un projet, parlons-en ». Tous les projets sont possibles à condition d’y croire et d’être crédible.

 

La France industrielle s’est créée à travers les 100 familles qui se sont mobilisées pour innover et mobiliser en grande quantité de la ressource financière et humaine. Cette classe sociale s’est ensuite drapée dans la légitimité qu’elle s’est construite, reprenant indirectement les codes de la noblesse qu’elle avait évincée en lui reprochant de s’imposer de manière déconnectée de ses apports avérés à la communauté.

Marqués par cette époque, les banquiers français délivrent le message suivant : « votre argent m’intéresse ».

Au-delà de cette réalité bancaire, c’est tout le système élitiste français qui est devenu la cause de l’effritement de la superbe hexagonale. Tout y semble calcifié : la haute administration, le syndicalisme, le monde l’éducation et de la recherche…

Le système éducatif commence tout juste à sortir de son schéma individualiste et normatif. Il va falloir attendre 30 ans pour que nous disposions de citoyens capables de se poser des questions et de voir le monde à travers de potentielles de coopération.

C’est en acceptant de se poser des questions que la confiance trouve une assise.

La France baigne pour le moment dans un système de défiance. Son système bancaire en fait parti.

 

La banque menacée

Jadis, les familles qui avaient de l’or, instrument d’échange de richesse, le confiaient soit à l’église, soit à l’orfèvre. C’est ainsi que ces derniers sont devenus les banquiers de la vie locale, avant d’être regroupés pour devenir des acteurs nationaux et transnationaux.

Il fallait de la confiance pour déposer son or auprès d’un personnage influent de la vie locale. Lorsqu’il devenait votre allié, il pouvait beaucoup pour vous et vos proches.

Quelle confiance nous livrent actuellement nos banquiers ? Les ménages français n’ont pas d’idée sur la question et c’est dommage. Le banquier ne joue plus son rôle de catalyseur de projet. Mais il doit le reconquérir s’il ne veut pas être délogé par des acteurs qui vont faire le job à sa place.

Ces acteurs seront numériques et transnationaux donc peu enclin à comprendre la vie locale. Or, la vie locale est celle dans laquelle chacun a envie et besoin d’y prendre sa place, y donner le meilleurs de lui-même pour y recevoir en retour la gratitude qui nourrit la confiance en soi et le désir de donner encore de sa personne. Une vie locale au rabais est une zone de survie !

Les investissements deviennent une affaire collective (démocratie économique). Les banquiers français ont la possibilité d’occuper ce terrain, lorgné par les GAFA et leurs homologues chinois. Leur activité est certes réglementée et la loi sera la même pour les entrants. Mais les entrants vont s’employer à répondre efficacement à des besoins nouveaux avec des outils nouveaux et la loi ne protègera plus les banquiers historiques avec leurs outils historiques.

 

La banque dans une société organique

La structure hiérarchique, qui a tout de même permis de mobiliser les hommes autour de grands projets dont nous sommes fiers, est progressivement abandonnée au profit d’une organisation basée sur les deals gagnants – gagnants, donnant accès à « l’efficacité globale » bien connue de la Nature.

« Seul je vais plus vite, ensemble, nous allons plus loin ».

Le paysage socio-économique se transforme sous l’effet du passage à l’économie circulaire, aux énergies renouvelables, à la relocalisation des productions, ou encore à la transition démocratique. La compétitivité d’un territoire se joue désormais sur sa capacité à enraciner les savoirs, à faire prospérer les talents et libérer les initiatives. Quant à la prospérité d’une nation repose sur sa capacité à mettre en harmonie la diversité de ses territoires.

La recomposition du tissu entrepreneurial s’opère donc en repartant des territoires. La monnaie va sans doute se diversifier avec une dimension personnelle (CPA) et locale (MLC).

Chaque citoyen va avoir un patrimoine à gérer et des projets à entreprendre.

 

Les banquiers historiques doivent donc s’imprégner de l’idée qu’ils sont un maillon de la compétitivité locale et exiger que celle-ci soit construite en coopération avec les autres acteurs.

Le risque pris depuis un tableur envoyé par @ n’aurait jamais dû exister.

Avec les générations montantes, ouvertes à la pensée coopérative et désireuses de reconstruire notre tissu économique et les nouveaux profils d’élus, la prise de risque est prise de manière réaliste : nous savons qu’il faut initier beaucoup de projets pour acquérir du savoir. L’échec n’est pas un drame, mais une étape. La perte sur un projet non aboutit devient une source d’enseignements recyclables. La banque se trouve partie prenante de cette recyclerie qui est à inventer.

 

 

Bouger maintenant

Toutes les mutations métier reposent sur le même trio : le prédictif, le préventif et l’action (curation pour la santé, répression pour la justice, investissement pour la démocratie…).

La banque est particulièrement préparée pour cette mutation : elle possède les données, les équipements et les ressources humaines.

La France de la noblesse d’épée et de robe et celle des 100 familles nous a permis d’arriver là nous nous en sommes. C’est une nouvelle France qui émerge, imprégnée de l’idée que les systèmes hiérarchiques ont vécu et que la vie se vit localement en synergie avec ses voisins, ses partenaires et ses alliés.

Le banquier de demain y est vivement attendu.