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Vers quoi allons-nous ?

À propos du numérique, je voudrais souligner le fait qu’il ne change pas nos vies : c’est parce que nous avons de nouvelles aspirations que nous nous dotons des outils qui vont nous permettre de les satisfaire. En l’occurrence, nous voulons déléguer les tâches peu valorisantes, fastidieuses, dangereuses ou hypercomplexes pour nous consacrer aux tâches créatives, empathiques et décisionnaires.

Pour info : selon l’INRS, environ 10 % des métiers vont être détruits, mais selon les études convergentes du BIT, de l’Ocde et de plusieurs universités, 49 % de la masse de travail productif va être détruite dans les 5 prochaines années.

 

À propos du travail, je voudrais souligner qu’il s’agit d’une notion floue que nous avons hérité de notre passé profond. Sapiens consacrait environ 2 heures par jour à subvenir à ses besoins. Le reste du temps, il faisait du social avec ses congénères !

Croyant se simplifier la vie, Sapiens a inventé l’agriculture et la propriété. L’agriculture, c’est lutter contre la nature qui n’en fait qu’à sa tête. La propriété, c’est lutter contre ceux qui l’accaparent. Deux enfers : qui font que nous rêvons encore aujourd’hui de liberté.

L’ère industrielle n’a fait qu’empirer les choses, notamment en amplifiant la structure hiérarchique de la société.

L’ère industrielle touche à sa fin. Elle se termine sur le constat que nous ne pouvons pas continuer à produire toujours plus. Notre priorité change : nous voulons produire toujours mieux, ce qui bouscule notre modèle de société. En particulier, nous passons d’une structure hiérarchique à une structure organique (le corps a une structure organique : aucun organe ne pilote tous les autres, mais tous collaborent pour que l’ensemble fonctionne au mieux).

Le passage à la structure organique correspond à la prise en compte de la nécessité de coopérer plutôt que de diriger. La nature a généralisé l’organisation organique de manière à faire face à la complexité et aux besoins d’évolution.

 

Les tâches dévolues à l’espace contributif sont, en particulier les tâches qui requièrent de l’empathie telles ce que celles dédiées au service à la personne. Actuellement placées dans le secteur marchand, elles ne donnent pas le résultat attendu. Placées dans le secteur contributif, elles vont pouvoir retrouver le moteur de la réciprocité qui décuple son efficacité.

Les gisements de progrès de toutes natures sont dans ce secteur car nous savons que lorsque les hommes conjuguent leurs atouts, ils décuplent leur efficacité.

 

Par ailleurs, la mondialisation se reconfigure : les blocs géopolitiques se mettent à fabriquer leurs propres yaourts et leurs voitures. Leurs échanges se recentrent sur les matières premières et les produits d’exception. Ainsi, la compétitivité des nations repose désormais sur la capacité à accumuler du savoir et à faire prospérer des talents.

Pour y parvenir, il faut développer un vivre ensemble attractif. Ce vivre ensemble va consommer beaucoup de notre attention. Ceci va être progressivement possible au fur et à mesure que nous allons déléguer aux robots les tâches qui ont dévoré la vie de nos aînés.

Ainsi, oui le numérique dévore nos emplois et nous devons prendre cela comme une opportunité réjouissante. Résister à cette mutation déferlante, c’est prendre le risque d’euthanasier le patrimoine de nos aînés et céder notre espace géographique et culturel à des populations plus ancrée dans notre époque.

 

Opportunité

Le challenge à présent n’est pas de sauver de l’emploi à tout prix, mais de réorienter progressivement nos activités vers des tâches contributives.

Par tâches contributives, il faut entendre le temps que nous passons à améliorer le bien commun sur long terme, par opposition aux tâches productives qui concernent la satisfaction de nos besoins personnels à court terme.

Actuellement, les tâches contributives sont embryonnaires et très mal récompensées. Mais elles vont devenir de plus en plus importantes.

Exemple : la justice dans sa forme actuelle devient ingérable. Elle devrait progressivement évoluer vers deux branches :

  • La conciliation, basée sur les progrès réalisés en matière de résolution de conflit,
  • L’arbitrage, basé sur les progrès réalisés en matière d’intelligence artificielle.

La partie conciliation est une activité éminemment empathique. Elle ne peut être confiée au secteur régalien ni au secteur marchand. Elle va donc se déployer dans le secteur contributif dont la finalité consiste à l’amélioration du bien-être collectif.

 

Comment s’y préparer

Nos institutions commencent à être très fortement déstabilisées par l’ampleur du changement qui s’impose à nous. Pour le moment, elles ne savent gérer et protéger que l’espace productif. Il ne s’agit pas de les renverser, mais de les adapter de manière à ce qu’elles soient capables également de faire prospérer le secteur contributif.

Durant le 20ème siècle, nous avons fait des progrès techniques considérables dont nous récoltons aujourd’hui les fruits. Mais pour les poursuivre, nous devons engager des progrès sociaux et démocratiques.

C’est, par exemple, dans ce contexte que réapparaissent les thématiques liées au revenu de base et aux monnaies complémentaires.

Mais pour avancer sur ces sujets, notre priorité consiste donc à :

  • Sortir au plus vite de nos propres dénies à propos du travail et de la monnaie,
  • D’explorer les pistes qui émergent, tant sur l’aspect technologique que sur l’aspect social.

Pour avancer, nous devons favoriser les organisations organiques à tous les niveaux de la société. C’est ce que veulent les générations montantes. Les seniors soutiennent cette mutation en apportant la connaissance du passé.