Déjà, en février 2021, selon le site canadien francophone « La Presse », Les États-Unis avaient enregistré leur deuxième plus grand déficit budgétaire depuis la Seconde Guerre mondiale tandis que la dette fédérale continuait de grimper au-delà du PIB : la dette nationale tournait alors autour de 22 500 milliards de dollars, soit 102,3 % du PIB… Depuis peu de progrès.

L’UE n’échappe pas à ce drame, pour ce qui est de la dette publique (contractée lorsque L’Etat fait des investissements ou emprunte pour faire face à une situation précaire). Ni pour ce qu’il en est des déficits publics (L’Etat dépense plus qu’il ne collecte de taxe et d’impôts).

Comme le montrent ces cartes, le sud de l’UE est plus rouge que le nord. Cette situation est mal expliquée aux citoyens. Elle les inquiète d’autant plus qu’ils sentent bien que la géopolitique, jusqu’alors favorable au bloc occidental, se reconfigure.

Ils voient bien qu’il va falloir être agile pour faire face à cette situation nouvelle. Or, chacun sait désormais que la paix sociale s’achète aussi à crédit et c’est à ce propos que les citoyens réclament des clarifications : l’argent public est-il intelligemment dépensé ?

 

Les périodes de mutations sont propices aux opportunités. Mais pour en bénéficier, il faut oser prendre des risques et faire des investissements.

Le changement de société que nous vivons, tout particulièrement en Europe, est propulsé, non pas par le changement climatique, ni les changements de source d’énergie, mais par le fait que nous sortons de la sédentarisation ! Les citoyens estiment que nous sommes désormais capables de satisfaire à peu près efficacement l’ensemble des besoins primaires de nos populations. Ils veulent rationaliser la manière de produire et de consommer.

Avec le temps libéré par cette rationalisation, ils veulent s’atteler à développer « un vivre ensemble » de haute qualité : des écoles attractives, des tribunaux efficaces, des hôpitaux accueillants, une démocratie dans laquelle ils peuvent s’investir… etc.

Ils veulent aussi un maximum de souveraineté stratégique, dont la souveraineté numérique qui se place désormais au cœur de la rationalisation souhaitée et nécessaire.

 

À la fin de la dernière guerre mondiale, notre gouvernance a été conçue pour développer l’économie de la demande, celle où les produits, même de basse qualité, trouvaient preneur tant les besoins d’équipement étaient forts. À présent, nous en finissons avec l’économie de l’offre, celle où les entreprises développent des trésors de créativité pour pousser à la consommation.

Nous entrons donc dans l’économie de la rationalisation : le progrès détruit de l’emploi et abaisse les prix ! Au bout du bout, la gouvernance basée sur le PIB avec sa logique de « toujours plus » se télescope avec la volonté de « faire mieux avec moins ». L’endettement devient difficile alors que les besoins en dépense publique devraient croître, du moins aussi longtemps que ces dépenses sont considérées comme des coûts et non des prérequis à la prospérité.

C’est ainsi que nos ennuis de dette commencent. La croissance ralentit et le PIB, en tant que repère, n’est plus efficace.

Cerise sur le gâteau, les autres espaces géopolitiques, qui entrent dans l’économie de la demande pour certains mais surtout de l’offre pour d’autres, se mettent à produire des biens et des services arrivés à maturité et bénéficiant de volumes permettant de grandes économies d’échelle !

 

Vu sous cet angle, chacun peut comprendre le désarroi des « princes qui nous gouvernent ». Il est clair qu’il va falloir oser une autre logique de gouvernance, faire évoluer nos institutions et nos outils de pilotage de l’économie.

Une piste consiste à reconnaître que l’Europe franchi un cap dans sa maturité. Elle comprend que les savoirs et les talents deviennent un facteur majeur de sa compétitivité et qu’en conséquence elle doit développer un « vivre ensemble » de haut niveau. Et dans le même temps, elle développe des relations de réciprocité avec ses partenaires.

En effet, afin de poursuivre notre évolution anthropologique, la priorité à présent consiste à favoriser l’éclosion du patrimoine humain dans toute sa diversité car c’est avec ce patrimoine qu’il est possible de créer de la valeur et de l’attractivité et d’avoir des surplus pertinents à échanger avec nos voisins.

Reste à structurer les mécanismes socio-économiques qui rendent cela possible. Le numérique nous permet de le faire. Quant à cette foutue dette, mieux vaut trouver des arrangements puisque les bailleurs de fonds ont eux-mêmes à faire face à cette mutation profonde.

Pour mémoire, la dette et la rente sont des notions qui sont apparues avec la sédentarisation. Elles n’ont jamais cessé de poser des problèmes. Voilà une opportunité pour s’atteler aux fléaux qui leur sont attribués.